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Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/218

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de Saint-Pétersbourg. ce style, dont je ne vis que plus tard les défauts, m’excitait vivement. Les discussions du romantisme pénétraient dans la maison de toutes parts ; on ne parlait que de Lamartine, de Victor Hugo. Le supérieur s’y mêlait, et, pendant près d’un an, aux lectures spirituelles, il ne fut pas question d’autre chose. L’autorité faisait ses réserves ; mais les concessions allaient bien au delà des réserves. C’est ainsi que je connus les batailles du siècle. Plus tard, la liberté de penser arriva également jusqu’à moi par les solvuntur objecta des théologies. La grande bonne foi de l’ancien enseignement ecclésiastique consistait à ne rien dissimuler de la force des objections ; comme les réponses étaient très faibles, un bon esprit pouvait faire son profit de la vérité où il la trouvait.

Le cours d’histoire fut pour moi une autre cause de vif éveil. M. l’abbé Richard[1] faisait ce cours dans l’esprit de l’école moderne, de la manière la plus distinguée. Je ne sais pour-

  1. Voir l’excellente notice que M. Foulon, maintenant archevêque de Besançon, a consacrée à l’abbé Richard.