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Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/353

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sur ce point, et, quels que soient les maux que la providence me réserve encore, je croirai toujours qu’elle me mène à mon plus grand bien possible par le moindre mal possible.

D’après des nouvelles que je viens de recevoir d’Allemagne, la place qui m’y était proposée est toujours à ma disposition[1] ; seulement je ne pourrai en prendre possession avant le printemps prochain. Tout cela me rend ce voyage bien problématique et me replonge dans de nouvelles incertitudes. On me propose toujours une année d’études libres dans Paris, durant laquelle je pourrais réfléchir sur l’avenir que je devrais embrasser, et aussi prendre mes grades universitaires. Je suis bien tenté, monsieur, de choisir ce dernier parti ; car, bien que je sois décidé à descendre encore au séminaire, pour conférer avec vous et avec mes supérieurs, néanmoins j’aurais beaucoup de répugnance à y faire un long séjour dans l’état d’âme où je me trouve. Je ne vois approcher qu’avec effroi l’époque où l’état intérieur le plus indéterminé devra se traduire par les démarches les plus décisives. Mon Dieu ! Qu’il est cruel d’être obligé de remonter ainsi le courant qu’on a longtemps suivi, et où l’on était si doucement porté ! Encore si j’étais sûr de l’avenir, si j’étais sûr que je pourrai un jour faire à mes idées la place qu’elles réclament, et poursuivre à mon aise et sans préoccupations extérieures l’œuvre de mon perfectionnement intellectuel et moral ! Mais, quand je

  1. Il s’agit ici d’une éducation privée dont il fut question pour moi durant quelque temps.