Aller au contenu

Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

et au souci de s’enrichir ; mais, quand il venait à la ville, il perdait presque toutes ses qualités, et ne contribuait plus que médiocrement à l’éducation intellectuelle et morale du pays.

La Révolution, pour ce nid de prêtres et de moines, fut en apparence un arrêt de mort. Le dernier évêque de Tréguier sortit un soir par une porte de derrière du bois qui avoisine l’évêché, et se réfugia en Angleterre. Le Concordat supprima l’évêché. La pauvre ville décapitée n’eut pas même un sous-préfet ; on lui préféra Lannion et Guingamp, villes plus profanes, plus bourgeoises ; mais de grandes constructions, aménagées de façon à ne pouvoir servir qu’à une seule chose, reconstituent presque toujours la chose pour laquelle elles ont été faites. Au moral, il est permis de dire ce qui n’est pas vrai au physique : quand les creux d’une coquille sont très profonds, ces creux ont le pouvoir de reformer l’animal qui s’y était moulé. Les immenses édifices monastiques de Tréguier se repeuplèrent ; l’ancien séminaire servit à l’établissement d’un collège ecclésiastique très estimé dans toute