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Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/154

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commun en Orient avec ce que nous appelons éducation. Ce sont les hommes d’école, au contraire, qui passent pour pédants et mal élevés. Dans cet état social, l’ignorance, qui, chez nous, condamne l’homme à un rang inférieur, est la condition des grandes choses et de la grande originalité.

Il n’est pas probable que Jésus ait su le grec. Cette langue était peu répandue en Judée hors des classes qui participaient au gouvernement et des villes habitées par les païens, comme Césarée[1]. L’idiome propre de Jésus était le dialecte syriaque mêlé d’hébreu qu’on parlait alors en Palestine[2]. À plus forte

  1. Mischna, Schekalim, iii, 2 ; Talmud de Jérusalem, Megilla, halaca xi ; Sota, vii, 1 ; Talmud de Babylone, Baba kama, 83 a ; Megilla, 8 b et suiv.
  2. Matth., xxvii, 46 ; Marc, iii, 17 ; v, 41 ; vii, 34 ; xiv, 36 ; xv, 34. L’expression ἡ πάτριος φωνή, dans les écrivains de ce temps, désigne toujours le dialecte sémitique qu’on parlait en Palestine (II Macch., vii, 21, 27 ; xii, 37 ; Actes, xxi, 37, 40 ; xxii, 2 ; xxvi, 14 ; Josèphe, Ant., XVIII, vi, 10 ; XX, sub fin. ; B. J., proœm., 1 ; V, vi, 3 ; V, ix, 2 ; VI, ii, 1 ; Contre Apion, I, 9 ; De Macc., 12, 16). Nous montrerons plus tard que quelques-uns des documents qui servirent de base aux Évangiles synoptiques ont été écrits en ce dialecte sémitique. Il en fut de même pour plusieurs apocryphes (IVe livre des Macch., xvi, ad calcem, etc.). Enfin, la chrétienté directement issue du premier mouvement galiléen (nazaréens, ébionim, etc.), laquelle se continua longtemps dans la Batanée et le Hauran, parlait un dialecte sémitique (Eusèbe, De situ et nomin. loc. hebr., au mot Χωϐά ; Épiph., Adv. hær., xxix,