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Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/393

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le patient semble ne plus s’appartenir, les infirmités dont la cause n’est pas visible, comme la surdité, le mutisme[1], étaient expliquées de la même manière. L’admirable traité « De la maladie sacrée » d’Hippocrate, qui posa, quatre siècles et demi avant Jésus, les vrais principes de la médecine sur ce sujet, n’avait point banni du monde une pareille erreur. On supposait qu’il y avait des procédés plus ou moins efficaces pour chasser les démons ; l’état d’exorciste était une profession régulière comme celle de médecin[2]. Il n’est pas douteux que Jésus n’ait eu de son vivant la réputation de posséder les derniers secrets de cet art[3]. Il y avait alors beaucoup de fous en Judée, sans doute par suite de la grande exaltation des esprits. Ces fous, qu’on laissait errer, comme cela a lieu encore aujourd’hui dans les mêmes régions, habitaient les grottes sépulcrales abandonnées, retraite ordinaire des vagabonds. Jésus avait beaucoup de prise sur ces malheureux[4]. On racontait au sujet de

  1. Matth., ix, 33 ; xii, 22 ; Marc, ix, 16, 24 ; Luc, xi, 14.
  2. Tobie, viii, 2-3 ; Matth., xii, 27 ; Marc, ix, 38 ; Act., xix, 13 ; Josèphe, Ant., VIII, ii, 5 ; Justin, Dial. cum Tryphone, 85 ; Lucien, Épigr. xxiii (xvii Dindorf).
  3. Matth., xvii, 20 ; Marc, ix, 24 et suiv.
  4. Matth., viii, 28 ; ix, 34 ; xii, 43 et suiv. ; xvii, 14 et suiv., 20 ; Marc, v, 1 et suiv. ; Luc, viii, 27 et suiv.