Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/478

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Ses raisonnements, il est vrai, étaient souvent subtils (la simplicité d’esprit et la subtilité se touchent : quand le simple veut raisonner, il est toujours un peu sophiste) ; on peut trouver que quelquefois il recherche les malentendus et les prolonge à dessein[1] ; son argumentation, jugée d’après les règles de la logique aristotélicienne, est très-faible. Mais, quand le charme sans pareil de son esprit trouvait à se montrer, c’étaient des triomphes. Un jour, on crut l’embarrasser en lui présentant une femme adultère et en lui demandant comment il fallait la traiter. On sait l’admirable réponse de Jésus[2]. La fine raillerie de l’homme du monde, tempérée par une bonté divine, ne pouvait s’exprimer en un trait plus exquis.

  1. Voir surtout les discussions rapportées par le quatrième Évangile, chapitre viii, par exemple. Hâtons-nous de dire que ces passages du quatrième Évangile n’ont que la valeur de fort anciennes conjectures sur la vie de Jésus.
  2. Jean, viii, 3 et suiv. Ce passage ne faisait point d’abord partie du quatrième Évangile ; il manque dans les manuscrits les plus anciens, et le texte en est assez flottant. Néanmoins, il est de tradition évangélique primitive, comme le prouvent les particularités singulières des versets 6, 8, qui ne sont pas dans le goût de Luc et des compilateurs de seconde main, lesquels ne mettent rien qui ne s’explique de soi-même. Il semble que cette histoire était connue de Papias, et se trouvait dans l’Évangile selon les hébreux (Eusèbe, Hist. eccl., III, 39 ; Appendice, ci-dessous, p. 504, note 2).