Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/63

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d’une certaine mollesse, si j’ose le dire, et susceptibles d’additions. Nous avons, à cet égard, un témoignage capital de la première moitié du iie siècle. Il est de Papias, évêque d’Hiérapolis, homme grave, homme de tradition, qui fut attentif toute sa vie à recueillir ce qu’on pouvait savoir de la personne de Jésus[1]. Après avoir déclaré qu’en pareille matière il donne la préférence à la tradition orale sur les livres, Papias mentionne deux écrits sur les actes et les paroles du Christ : 1o un écrit de Marc, interprète de l’apôtre Pierre, écrit court, incomplet, non rangé par ordre chronologique, comprenant des récits et des discours (λεχθέντα ἢ πραχθέντα), composé d’après les renseignements et les souvenirs de l’apôtre Pierre[2] ; 2o un recueil de sentences (λόγια) écrit en hébreu[3] par Matthieu, « et que chacun a traduit[4] comme il a pu ». Il est certain que ces deux

  1. Dans Eusèbe, Hist. eccl., III, 39. On ne saurait élever un doute quelconque sur l’authenticité de ce passage. Eusèbe, en effet, loin d’exagérer l’autorité de Papias, est embarrassé de sa naïveté, de son millénarisme grossier, et se tire d’affaire en le traitant de petit esprit. Comp. Irénée, Adv. haer., III, i, 1 ; V, xxxiii, 3-4.
  2. Papias, sur ce point, s’en référait à une autorité plus ancienne encore, à celle de Presbyteros Joannes. (Sur ce personnage, voir ci-dessous, p. lxxii-lxxiii, note).
  3. C’est-à-dire en dialecte sémitique.
  4. Ἡρμήνευσε. Rapproché comme il est de ἑϐραΐδι διαλέκτῳ, ce mot