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Page:Renaud - Recueil intime, 1881.djvu/75

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A UNE MARTYRE DE DEMAIN

De l’âme la meilleure et du meilleur amour,
Plus que d’une hirondelle au sommet d’une tour,
Plus que d’un plancher qui s’effondre !

Hélas ! le bien-aimé que presseront tes bras,
S’il ne te trahit point, toi, tu le trahiras,
Vierge naïve comme un ange,
L’un ou l’autre de vous un jour n’aimera plus.
Pourquoi ? sait-on pourquoi le flux et le reflux ?
Sait-on pourquoi le vent qui change ?

L’amour donné par lui te semblera bien peu,
Près du songe entrevu dans le firmament bleu.
Tu voudras essayer, connaître.
Tu ne trouveras point. Tu chercheras encor,
Haletante, changeant sans trêve le décor,
Allant aux abîmes peut-être.

Car l’océan sans fin qui commence au baiser,
C’est notre sort commun de vouloir l’épuiser,
Pendant nos jeunesses si brèves.
Mais on s’acharne en vain, on n’est jamais vainqueur,
Plus la joie est aux sens, plus le deuil est au cœur.
Aux vastes flots, les vastes grèves.