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Page:Renee Dunan La Culotte en jersey de soie 1923.djvu/19

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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

mon examen d’anatomie en juillet précédent. J’étais, dans ce milieu vaniteux et guindé, une personnalité indépendante et modeste. Aussi me faisais-je remarquer.

— Tes parents habitaient la ville ?

— Non certes ! J’aurais, en ce cas, choisi une profession qui me contraignit à ficher le camp ailleurs. Mes parents habitaient assez loin. J’étais libre comme l’air. Il n’y avait même, dans le patelin, aucun correspondant chargé de faire la police de mes mœurs et de mes dimanches.

J’étais d’autant plus libre que manquant d’ambitions je ne voulais pas être « de la fabrique » et me gardais toujours de concourir pour internats ou externats. Ce sont situations excellentes, qui assurent les honneurs et les grades, mais réclament qu’on soit docile, flagorneur et humble. Il n’y avait rien de fait. J’étais devenue une personnalité parce que Gratip, le chirurgien et professeur illustrissime voulait m’inonder du lait…

— Quoi ?

— De ses faveurs. Il m’avait promis de me hisser aux plus hauts sommets de la Médecine considérée comme une aristocratie fermée. Les médailles d’or et de simple bronze, les diplômes, les attestations qu’on met sur son papier à lettre, il se faisait fort de me faire couvrir…

— Ah !…

— De ces honneurs. Alors, ma carrière serait plate comme un billard. Le droit de vie et de mort sur les milliers d’imbéciles qui viendraient se traîner à mes genoux pour avoir à prix d’or une ordonnance avec Aq. Sx : 100 g + Sac : 5 g p 1 cmc hor post Cr. » ce droit — en l’espèce inoffensif — serait définitif, catholicisé (Je veux dire universel) et irréductible…