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Page:Renee Dunan La Culotte en jersey de soie 1923.djvu/38

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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

une lourde hérédité, soit d’excellents prodromes de paralysie générale. Mais je ne compris pas l’attitude de ces gens.

La femme était-elle une sadique jouissant des tortures de son mari ou si là encore il s’agissait de quelque secrète histoire d’argent ? Question ? Quand à lui, je ne sus rien lire dans ses propos incohérents. Si j’avais eu à ce moment-là connaissance approfondie des travaux modernes de psycho-pathologie, peut-être eussé-je interprété la chose comme l’acte cruel — récemment étudié — d’une femme souffrant de ne pas posséder d’enfant. Elle se venge sur le conjoint qui n’a pas su être un mâle et se croit justifiée à le faire sans pitié. Mais quelle vengeance ? Des pratiques sexuelles féroces ? L’érotisme d’une matrone ardente prête à tuer, s’il le fallait, son mari pour obtenir une progéniture ? Le cas est curieux et doit être rare. Mais que venais-je faire là ? Je n’eus pas l’idée de demander communication des papiers pharmaceutiques de Tallurac. J’aurais su peut-être si tel était le cas et si le médecin, chose vraisemblable, faisait cause commune avec la femme contre l’homme hébété. On me demanda « une ordonnance ». J’avais vu sur le papier que Tallurac m’avait laissé « ne rien ordonner. » Il ne fallait pas que je sache, peut-être ? J’annonçai le retour de l’illustre soigneur et pris congé. Comme je descendais l’escalier, la bonne, une quadragénaire délurée et souriante, se pencha vers moi et murmura : « Il n’en a pas pour longtemps… » Je la regardai en face, et elle ajouta avec une intention : « Monsieur Tallurac est bien vu ici… » C’est tout ce que je sus du roman qui se cachait dans cette maison, ma foi, entourée d’un beau parc et cossue en son mobilier.

Le soir tombait. Nous revenions au trot lent du cheval fatigué. Somptueuses et vêtues de couleurs