Aller au contenu

Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/213

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

modes de l’intelligence ne devaient être, selon lui, que des imitations ou des participations imparfaites. Ces derniers termes n’exprimaient pas quelque chose de bien différent de ce que les pythagoriciens avaient pu entendre par l’identité du sujet abstrait, — le Nombre, à leur point de vue, — avec l’essence de la chose ; car l’Idée au point de vue de Platon, était ce que la chose définie a de stable, de constant, et, à vrai dire, de réel. Les idées réelles, au sens de la psychologie moderne, n’étaient à ses yeux que des images affaiblies et variables de celles qui ont l’existence en soi et l’éternité.

Cette doctrine éloigna, pour toute la suite des siècles, la psychologie et la théologie de la conception rationnelle de la personnalité comme fondement et de l’entendement humain et de la Souveraine Intelligence. Les Idées étant envisagées hors de Dieu et hors de l’homme, la conscience se trouvait dénuée de matière propre, ou n’en avait qu’une empruntée, et perdait ses objets directs et son autonomie. Dieu n’était pas intelligible comme supérieur aux Idées, parce que sans les relations, que seules elles fournissent, il ne pouvait être défini : il était l’Inconditionné, l’Absolu ; et il n’était pas davantage intelligible comme dépendant des Idées, et démiurge chargé de prendre en elles le modèle du monde, parce que l’on n’assignait pour ce dieu inférieur ni origine, ni fondement d’existence.

La doctrine des Idées subit, ainsi d’ailleurs que la théorie opposée d’Aristote sur les essences individuelles, une longue éclipse pendant le règne du dogmatisme matérialiste sous les formes antagonistes du stoïcisme et de l’épicurisme, à moins cependant qu’on ne regarde comme des sortes d’Idées les raisons séminales de l’évolutionnisme stoïcien. Mais, à l’époque où la théologie fut