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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/64

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est un paralogisme : Si, disait-on, le monde n’avait pas une cause, il viendrait de rien, ce qui est contradictoire. L’objection est vaine ; celui qui nie la cause du monde n’entend pas dire que le monde a une cause, à savoir le néant, il entend que le monde est sans cause. Nier une application du principe de causalité ne serait point une contradiction. Mais la thèse du Conditionné n’a rien à débattre avec la question ainsi posée : ni la doctrine de l’éternité du monde, ou de l’éternité de l’auteur du monde, ne la concerne, ni celle d’un commencement absolu par l’acte de l’être premier cause de soi, lequel ne pourrait se définir que comme existant avant d’exister. On admet une cause du monde, par laquelle son unité et ses lois sont extérieurement constituées. Lorsque ensuite on se pose la question de l’application de la catégorie de causalité à la cause première elle-même, comme réclamant une origine et une cause, on se conforme au principe de relativité en constatant la nécessité logique de mettre un terme à la rétrogradation du conditionnement. La recherche, sans cela, n’échappe pas seulement à l’expérience possible, comme les plus communes questions de la métaphysique ; elle sort des limites de l’intelligence possible.

Le dilemme dégagé de ces difficultés et de ces équivoques se présente comme une décision logique à prendre entre la thèse du Conditionné, telle qu’elle vient d’être expliquée, et celle qui réclame du philosophe la conception de la chose en soi, conçue par soi indépendamment de la conception de toute autre chose. Les deux thèses sont contradictoires : la première exige, en effet, que toute chose soit conçue moyennant sa relation à d’autres, en une fonction de phénomènes liés par les lois de la connaissance en nous ; la