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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/82

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l’essence (XI), indéfinissable. L’air de mystère donné aux allusions à cet absolu divin a peut-être pour but d’écarter toute comparaison avec des dieux connus. La seconde hypostase est formée de l’ensemble des Idées, dont le rapport au principe générateur n’est pas expliqué. La troisième est le Démiurge, dieu de forme personnelle qui accomplit, en prenant modèle sur les Idées, l’œuvre de création des dieux subordonnés et de l’Âme du monde. Peut-être faut-il regarder cette âme comme une quatrième hypostase, parce que les âmes individuelles, unies à des corps, en sont tirées pour être réparties entre les astres qu’elles doivent avoir pour demeures : opération des dieux secondaires, accomplie à l’aide de la méthode symbolique qui a servi pour la création de l’ordre général et dont l’usage leur est transmis par le Démiurge.

Cette cosmogonie diffère du tout au tout du développement d’une substance dont les phénomènes sortiraient, comme ses propriétés, par des opérations conformes à sa nature. L’Inconditionné, non la Substance, est le principe de Platon ; quand les conditions apparaissent, c’est de l’action d’un être conscient que Platon en fait dépendre l’établissement. Il serait bon que les historiens de la philosophie et les traducteurs évitassent l’emploi du mot substance pour désigner l’essence éternelle (ἀίδιον οὐσίαν) de Platon, celle dont il exclut formellement les conditions temporelles de l’existence. La confusion des mots favorise celle des idées, or les doctrines ne peuvent guère différer entre elles plus profondément qu’en plaçant le monde hors de Dieu ou en regardant le monde comme Dieu à l’état développé. La question de la Substance est fort différente de celle de l’Inconditionné, elle peut y intervenir selon la ma-