Aller au contenu

Page:Restif de la Bretonne - La Dernière Aventure d’un homme de quarante-cinq ans, éd. d’Alméras.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
46
LA DERNIERE AVENTURE


adorable et la plus tendre des filles ! De douces larmes coulent, quand je me retrace les traits généreux qui embellissent ta vie ; elles deviennent voluptueuses, quand je songe aux délices que tu me donnas en les partageant ; je frémis, je frissonne, je pleure, je m’écrie quand je me rappelle ta mort ! « Ange céleste ! Créature divine, ton père et le mien te donnèrent la beauté d’une immortelle et la durée d’une rose ! Tu es morte sur mon sein !… » « Et vous, charmante Elise, vous dans qui trois lustres augmentés de trois ans, épanouissent toutes les fleurs de la jeunesse, aimable et touchante amie, qui avez entrepris de consoler mon automne et d’égayer mon hiver, lisez, je vous prie, l’histoire d’une autre Elise et de l’infortuné Parlis.

Parlis avait quarante-trois ans. À cet âge, il se crut prêt à respirer, les malheurs qui le poursuivaient dès sa jeunesse, semblaient vaincus par la constance ; il sortait de la fange, où l’envie, la malice noire, l’insultant mépris, se plaisaient à le retenir ; il avait terrassé le monstre qui empoisonne tous les détails de la vie ; libre comme l’air, il vivait seul, et ne dépendait que de Dieu. Il vécut ainsi deux années, les plus heureuses qu’il eût encore passées. « Que mon automne est belle ! » disait-il un jour avec complaisance. Il s’occupait ; il travaillait avec plaisir et sans peine, comme l’homme innocent au jardin de délices. Il allait partout vantant son bonheur ; il le rendait plus grand, en le faisant envier ; il le doublait encore en le savourant ; car il en connaissait le prix : on sent vivement le plaisir quand on a été malheureux !… Hélas, il détruisit lui-même son bonheur…

Redevenu malheureux, par son ignorance, sa santé s’affaiblit. Il languissait, lorsqu’il trouva un sort heureux, s il avait su en profiter !

    placée en tête de la Bibliographie et Iconographie de tous les ouvrages de Restif de la Bretonne, par le bibliophile Jacob, p. 9.
    Restif a longuement parlé de Zéphire dans Monsieur Nicolas, t. II. pp. 183 à 316 : t. m, pp. 36, 63, 92, 139, 158, 222, 239, 236.