Aller au contenu

Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mot, le bon chapelain m’embrassa en disant : « — Quelles dispositions !… Avez-vous encore lu quelque autre livre, mon petit ami ? — Oui, Monsieur le chapelain : le Bon Pasteur, par le B. Dom Jean de Palafox, évêque d’Osma. — Je ne connais pas ce livre-là, » dit-il à mon frère. — Cela est assez bon ; mais c’est de la dévotion Espagnole. — Monsieur Nicolas ? je voudrais avoir une idée de ce livre : pourriez-vous m’en citer quelque chose ? — Un bon curé s’endormit la veille de Noël en attendant les matines… » Je récitai le livre entier, sans hésiter, mot à mot, comme ceux qui ont appris par cœur. Ni le chapelain, ni le curé ne m’interrompirent. Mon frère, qui me châtiait si sévèrement, quand il venait voir mon père et ma mère, ne me connaissait pas ; il n’avait de moi que les idées fausses que lui donnaient mes sœurs du premier lit, et ma mère elle-même, qui, pour ne pas me gâter, jamais ne démentait, à mon sujet, de grandes filles dont elle n’était que la belle-mère ; mon frère, dis-je, qui n’était pas fort admirateur, fut également surpris de ma mémoire et de mon intelligence. Pour le bon chapelain, il se retourna vers les quatre dévotes : — « Hé bien, mes sœurs ? — S’il est humble, ce sera un jour un saint ! » dit Mlle de Courtives. — « Si… », dit tout bas Marguerite en souriant. Les deux autres dévotes assurèrent modestement que je serais humble… — « Il ne dément pas la famille, » reprit le chapelain en s’adressant à mon frère, « et cet enfant ira loin si on ne