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Page:Revon - Anthologie de la littérature japonaise, 1923.djvu/35

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1. — PÉRIODE ARCHAÏQUE


I. — LA POÉSIE


CHANTS PRIMITIFS


La poésie japonaise, à l’époque où le génie national était encore spontané ou à peine teinté d’idées chinoises, est représentée par des chants[1], depuis longtemps conservés par la tradition orale, mais qui ne semblent guère avoir été recueillis par l’écriture qu’au viiie siècle après Jésus-Christ. C’est, en effet, à l’ouverture de la période de Nara que, pour la première fois, nous les voyons apparaître, enchâssés dans les récits mythiques ou historiques du Kojiki (111 morceaux) et du Nihonnghi (132). Il serait inutile de traduire ici ces petits poèmes, d’une inspiration encore bien terre à terre, et qui, pour la plupart, exigent de longs éclaircissements. Je me contenterai d’en donner une idée au moyen de trois exemples : le premier, du type le plus primitif ; le second, d’un type moyen ; le dernier, du type le plus relevé.

Chant que les guerriers de Jimmou, le légendaire fondateur de la dynastie, auraient improvisé après un massacre, en 663 avant Jésus-Christ[2] :

  1. Outa. Ce seul mot suffit à montrer que les Japonais ont toujours considéré la poésie comme devant être chantée. Au Japon, on ne dit pas : « réciter des vers » ; on dit : « chanter un chant », outa wo outa-ou.
  2. Précisons, dès le début, dans quelle mesure on doit ajouter foi à la chronologie japonaise. Cette chronologie, pour les premiers siècles, est une pure invention du Nihonnghi. En effet, les Japonais ne reçurent l’écriture, apportée de Chine par des lettrés coréens, que vers l’an 400 de notre ère, et le calendrier, chinois encore, qu’en l’année 553. Il est donc évident que des dates relatives au viie siècle avant J.-C. ne peuvent reposer ni sur des documents, ni sur des calculs sérieux. De