Aller au contenu

Page:Revue Musicale de Lyon 1904-01-12.pdf/5

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
149
revue musicale de lyon

Le premier lieutenant, dont on connaisse le nom, est un nommé Nicolas Hestier, qui, en 1508, avait dans sa juridiction la Touraine. On va voir que les musiciens de Lyon ne tardèrent pas à être aux prises avec un personnage analogue[1].

Il est à croire que si ce délégué et tous ceux qui, dans la suite, soutinrent des prétentions pareilles, eussent été Lyonnais, ils ne se fussent pas exposés à payer leurs charges pour courir après un profit aléatoire. Enfants de notre cité, ils auraient connu avec quel soin jaloux étaient défendus les privilèges de la ville. Ils trouvèrent en effet, pour leur résister, non seulement les musiciens, mais le consulat, conservateur des droits locaux, dont la concession n’était pas sans lui coûter cher.

La première trace de la lutte remonte en 1517 et se trouve consignée dans un mandement de 6 liv. à payer à sieur Pierre Laurencin pour la vuydange de procès des eulx-disant roy et maîstres jurés labourins. Le litige était pendant, en la cour de la Sénéchaussée, entre : Jehan d’Escosse, soi-disant roy, et certains nommés Petit-Jehan le Rebequet, Mochet[2]et certains autres leurs consorts eulx-disans maîstres jurés de l’art de tabourin et ménéstriers de la dite ville, d’une part ; et les conseillers de la ville, pour intérêt de la chose publique, d’autre part. Le Roy des Violons avait profité d’une attaque dirigée contre les privilèges du travail à Lyon, pour introduire ses lieutenants et ses prétentions dans la place.

Dans ce litige, le consulat, tout en sauvegardant les privilèges municipaux et l’intérêt des musiciens, servait aussi celui des amateurs de musique, qui se heurtaient à un tarif fort élevé fixé, à son appétit, par sa majesté ménestrière.

La sénéchaussée donna gain de cause aux Lyonnais, mais l’affaire fut envoyée au Parlement, où elle eut vraisemblablement le même sort.

Indépendamment de son intérêt local, le document visé permet de combler en partie une lacune de plus d’un siècle, qui existe dans la dynastie violoneuse.

En effet, ni M. Bernhard, ni, après lui, M. d’Auriac ne citent aucun Roy des Violons, entre Jehan Facien (1422) et Roussol (1572). Jehan d’Escosse prendrait place entre les deux[3].

La tranquillité de nos musiciens ne fut pas bien longue : cette fois, le péril les englobait avec tous les corps d’état et métiers de la ville. Dans un but fiscal, Henri iii ordonna en 1581 l’établissement de maîtrises dans les Villes du Royaume non jurées : les joueurs et faiseurs d’instruments de Lyon furent taxés d’un droit de deux écus, modéré à deux tiers en 1597. On peut penser si le consulat s’opposa à la publication de ces édits, sans pouvoir toutefois obtenir satisfaction avant 1606.

En 1625, Louis Constantin, qui venait d’obtenir de Louis xiii, le titre de Roy et maîstre des menestriers et de tous les joueurs d’instruments tant hauts que bas du Royaume, se crut assez fort pour relancer les musiciens de Lyon et les obliger à prendre des lettres de maîtrise. Toujours sans succès.

Moins de quarante ans après, la lutte recommence : Guillaume Dumanoir avait obtenu en 1657, sans financer, en récom-

  1. V. Bernhard ; dissertation sur la corporation des Ménétriers ; et D’Auriac : La corporation des Ménétriers.
  2. Petit Jehan le Rebequet (1507-1547) ménestrier, était natif de La Baume en Viennois, il figure comme musicien au banquet offert aux ambassadeurs suisses en 1547.

    Jean Quille dit Mochet, taborineur, figure dans les pièces d’archives depuis 1507. Il fut inhumé à Saint-Paul en 1524. Le quartier Bourgneuf était le centre des bandes de musiciens.

  3. Dans une liste des Officiers domestiques de l’Hostile de Madame Loyse et Charlotte de France, fille du Roy François Ier, du 1er octobre 1516, au dernier May 1517, figure, Jehan Grand dit d’Escosse, joueur de musette.