L’ÉNIGME DE GIVREUSE[1]
XIV
Il courait au hasard, la tête perdue ; soudain, le rire éclata derrière lui et, se tournant, il vit la silhouette pâle, à trois pas :
— Vous voyez, — dit-elle… — je suis insaisissable. Et voici celle que nous cherchions…
Une phosphorescence s’insinuait parmi les arbres, puis une lueur de veilleuse ; on eut le sentiment d’une immense présence ; enfin, l’astre rouge et froid se dressa parmi les colonnades.
— Voici cette main que vous vouliez prendre, — dit-elle avec une douceur équivoque. — C’est une main amie.
Il prit la petite main avec crainte ; il s’agenouilla pour y mettre un baiser :
— Et vraiment, vous me faites la cour ?… Prenez garde…
— Qu’y faire, si je vous aime ?
— M’aimer ?… Croyez-vous ?
Elle lui prit le bras, elle le ramena sur la pelouse pareille à un grand étang verdâtre ; des noctuelles voletaient éperdument ; un crapaud chantait ses amours obscures :
— C’est effrayant ce que vous venez de me dire ! — murmura-t-elle. — Mais ce n’est pas vrai…
— Pas vrai ! — gémit-il. — Aussi vrai que ma vie même…
- ↑ Voir la Revue de Paris du 1er, du 15 décembre 1916 et du 1er janvier 1917.