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Page:Revue de Paris - 1900 - tome 4.djvu/267

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SAINTE-NITOUCHE


I

Le plus achalandé des marchands de tabac, à Coulobres, s’appelait Maurel. C’est à cause de sa rudesse qu’on lui avait donné ce surnom de Tahacco, où les gens du Languedoc retrouvaient, à travers leur patois, en même temps que l’image de sonmétier, l’air un peu farouche de sa maison et de sa personne. Il vivait seul dans cette petite maison noire, qui semblait pressée entre deux maisons d’importance aux maga-sins profonds : à gauche, celle des Bessières, les merciers ; à droite, celle de Trébosc, le menuisier. Depuis la mort de son frère, deux ans bientôt, son débit lui importait peu, aussi peu que la ville avec ses commérages éternels. Pourtant, ce débit demeurait le premier de Coulobres. Assez consciencieux pour vendre au poids exact et soigner sa marchandise, Tabacco attirait, sans la moindre réclame, jusqu’aux paysans, qui s’approvisionnaient chez lui le samedi, jour de marché. À la vérité, la boutiquette était admirablement située, rue Courte, sur le carreau de la halle, où aboutissent les grandes rues des différente quartiers. Les fumeurs montaient du Planol, de la rue de l’Église, de la rue Conti, ou descendaient de l’avenue du Quai, de la rue de Béziers, de la rue de la Foire. .Avant d’aller se promener sous la halle, ils se rendaient chez Tabacco. Là, on causait, par groupes. Tabacco ne parlait