Page:Revue de métaphysique et de morale - 28.djvu/527

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ter telle ou telle proposition toute faite, mais pour le connaître, pour savoir ce qu’il est, d’où il vient, où il tend.

Pour une double raison, il est intéressant à étudier de ce point de vue. D’abord, on peut espérer qu’il nous aidera à comprendre les états sociaux qui l’ont suscité. Car précisément parce qu’il en dérive, il les manifeste et les exprime à sa façon, et, par cela même, il nous donne un moyen de plus pour les atteindre. Ce n’est pas assurément qu’il les reflète avec exactitude. Tout au contraire, pour les motifs que nous avons dits plus haut, on peut être certain qu’il les réfracte involontairement et ne nous en donne qu’une expression infidèle, de même que le malade interprète mal les sensations qu’il éprouve et les attribue le plus souvent à une cause qui n’est pas la vraie. Mais ces sensations mêmes, telles qu’elles sont, ont leur intérêt, et le clinicien les relève avec soin et en tient grand compte. Elles sont un élément du diagnostic et un élément fort important. Par exemple, il n’est pas indifférent de savoir où elles sont ressenties, quand elles ont débuté. De même, il importe au plus haut point de déterminer l’époque où le socialisme a commencé à se produire. C’est un cri de détresse collective, disions-nous, eh bien ! il est essentiel de fixer le moment où ce cri a été poussé pour la première fois. Car, suivant qu’on y verra un fait récent qui tient à des conditions toutes nouvelles de la vie collective, ou, au contraire, une simple réédition, une variante tout au plus des plaintes que les misérables de toutes les époques et de toutes les sociétés ont fait entendre, des éternelles revendications des pauvres contre les riches, on jugera tout autrement des tendances que le socialisme manifeste. Dans le second cas, on sera porté à croire qu’elles ne peuvent pas plus aboutir que la misère humaine ne peut finir ; on les considérera comme une sorte de mal chronique de l’humanité qui, de temps en temps, au cours de l’histoire, sous l’influence de circonstances passagères, semble devenir plus aigu et plus douloureux, mais qui finit toujours par s’apaiser à la longue, et alors on s’attachera uniquement à chercher quelques calmants pour l’endormir à nouveau. Si, au contraire, on trouve qu’il est de date récente, qu’il tient à une situation sans analogue dans l’histoire, on ne peut plus conclure à sa chronicité, et il est moins aisé d’en prendre son parti. Mais ce n’est pas seulement pour déterminer la nature du mal que cette étude du socialisme promet d’être instructive, c’est aussi pour trouver les