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Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 1.djvu/271

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DESCRIPTION DE TEMBOCTOU.

ramasser une petite provision de sel pour leur consommation. En général, les hommes de cette classe sont moins malheureux à Temboctou que dans d’autres contrées ; ils sont bien vêtus, bien nourris, rarement battus ; on les oblige à pratiquer les cérémonies religieuses, ce qu’ils font très-exactement ; mais ils n’en sont pas moins regardés comme une marchandise ; on les exporte à Tripoli, à Maroc, et sur d’autres parties de la côte, où ils ne sont pas aussi heureux qu’à Temboctou ; c’est toujours avec regret qu’ils partent de cette ville, quoiqu’ils ignorent le sort qui leur est destiné.

Au moment où je la quittai, je vis plusieurs esclaves, quoique ne se connaissant pas, se faire réciproquement des adieux touchans : la conformité de leur triste condition excite entre eux un sentiment de sympathie et d’intérêts mutuels ; ils se font, de part et d’autre, des recommandations de bonne conduite. Mais les Maures chargés de les emmener pressent souvent leur départ, et les arrachent à ces doux épanchemens, si bien faits pour apitoyer sur leur sort.

Étant à la mosquée, un Maure d’un certain âge s’approcha de moi gravement et, sans me parler, mit dans la poche de mon coussabe une poignée de cauris, monnaie du pays : il s’éloigna si promptement qu’il ne me donna pas le temps de le remercier. Je fus très-surpris de cette manière délicate de faire l’aumône.

La ville de Temboctou peut avoir trois milles de tour ; elle forme une espèce de triangle : les maisons