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Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 1.djvu/352

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ARCHIVES GÉOGRAPHIQUES.

sur leur injuste agresseur de lui rendre blessure pour blessure.

Soit que les manchots aient à redouter des ennemis dans les animaux qui vivent aux Malouines, tels que le chien antarctique entre autres, soit que les côtes schisteuses de la grande terre ne leur conviennent point, il est de fait que ce n’est que sur les îlots couverts de gramens qu’ils établissent leurs terriers. Ils pratiquent des sentiers à travers ces forêts herbacées, sentiers très-battus, qui entretiennent leurs communications avec la mer ; leurs galeries souterraines sont percées dans un sol si meuble, qu’il m’arriva fréquemment d’enfoncer en marchant sur leur route, et d’être mordu avec force par l’oiseau couché sur son nid, et inquiet d’une visite aussi inopinée. Quelques femelles couvaient encore pendant mon séjour aux îles Malouines, et rien ne pouvait les distraire de leurs fonctions maternelles. J’aimais à épier les soins qu’elles prenaient de leur progéniture ; et leur attention n’était point troublée par la mienne : car elles se bornaient à quelques mouvemens de tête en apparence ridicules. Lorsque les jeunes manchots sont élevés, et par conséquent capables de prendre la mer, la famille entière abandonne sa demeure terrestre, et va vivre dans l’océan pendant six mois de l’année, pour accomplir ainsi les vues admirables de cette nature si féconde et si incompréhensible. Le cri de ces oiseaux est un braiement analogue à celui de l’âne, tellement ressemblant, surtout à l’instant où le soleil se couche, que l’illu-