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Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 1.djvu/227

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CORRESPONDANCE ET VARIÉTÉS.

arriva en effet vers le milieu de la nuit. Tout était plongé dans le silence ; les chiens, reconnaissant l’approche de leur maître, ne firent aucun bruit. Il attacha doucement son cheval en dehors et entra dans la hutte. Quelques poignées de feuilles sèches qu’il jeta sur le foyer s’enflammèrent aussitôt, et à la lueur qu’elles répandirent, Payton Skah aperçut sa femme profondément endormie, et auprès d’elle son ancien amant. À cet aspect, son premier mouvement fut de saisir son couteau de chasse, qu’il leva sur le couple criminel ; mais une réflexion soudaine vint l’arrêter, il replaça l’arme dans son fourreau, sortit de la hutte et alla chercher ailleurs du repos et un sommeil qui n’approcha pas de ses paupières.

Au point du jour, il se dirigea vers sa demeure, au moment où Chuntay Washtay et son amant en sortaient. Il leur ordonna d’y rentrer, les suivit et dit à sa femme de préparer le repas du matin. Ces ordres furent exécutés sur-le-champ ; elle mit un plateau de bois devant son mari, un autre devant le jeune Sioux, qui, persuadé qu’il allait mourir, ne démentit pas l’indifférence et la fermeté naturelles aux Indiens dans de semblables momens. Il mangea donc en silence et sans manifester aucune émotion. Quand le repas fût achevé, Payton Skah prit sa pipe, la remplit de tabac mêlé avec de l’écorce de saule rouge, fuma quelques gorgées et la remit au jeune homme. Ils se la passèrent ainsi alternativement jusqu’à ce qu’elle fût achevée, après quoi l’époux offensé dit à sa femme de ramasser tous ses vêtemens et d’en faire un paquet. Il se leva ensuite d’un air grave, et dit à son hôte « Un autre à ma place vous aurait percé d’une flèche pendant votre sommeil ; mais mon cœur est grand, je renonce à Chuntay Washtay, que vous aviez aimée et demandée avant moi, et qui sera plus heureuse avec vous. Je vous la cède, et afin que vous puissiez pourvoir à ses besoins, prenez mon cheval, mon arc et mes flèches. Allez, partez ensemble et soyons amis ! » À ces mots, la jeune femme, qui toute tremblante s’attendait à avoir le nez coupé, et son amant, qui se préparait à la mort, reprirent courage et sor-