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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 1.djvu/447

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MOHAMMED-ALI-PACHA.

Avant de pénétrer dans l’intérieur de cette Égypte, naguère gisante et inanimée comme les momies de ses tombeaux, arrêtons un instant nos regards sur l’homme qui l’arrache à ses langes séculaires.

L’an de l’hégire 1151 (1775), un pauvre officier de police mourut à Cavala, petit port de l’eyalet de Roum-Hi, laissant un fils âgé de quatre ans, sans pain, sans asile, et, ce qui était plus cruel encore, sans parens et sans amis. Les Turks, comme on le sait, sont charitables. L’aga recueillit l’orphelin dans son harem, et lui apprit ce qui constituait alors en Turquie une éducation complète, l’équitation, l’exercice du djérid, le maniement du sabre et de la carabine. Cet enfant, c’était ce Mohammed-Ali, qui, soixante ans plus tard, devait relever un empire, et en ébranler un autre.

Il était dans sa destinée de n’attirer les regards du monde qu’à l’âge où les hommes politiques sont déjà sur le déclin de leur gloire ; et ce n’est pas une des particularités les moins remarquables de cette existence, si bizarrement accidentée d’ailleurs, que de voir ses plus belles années, ses années d’une jeunesse rêveuse d’avenir, et délirante d’ambition, s’écouler bourgeoisement dans un comptoir de marchand de tabac. Telle était la position que Mohammed-Ali s’était faite dans le pays, en quittant la maison qui avait nourri son enfance. Apparemment il fallait que le réformateur