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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 1.djvu/81

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UNE BONNE FORTUNE.

xliii.

Quand je rentrai chez moi, je vis cette richesse.
Je me souvins alors de ce jour de détresse
Où j’avais à l’enfant donné mes deux écus.
C’était par charité : je les croyais perdus.
De celui qui voit tout je compris la sagesse ;
La mère, ce soir-là, me les avait rendus.

xliv.

Toi qui me viens du pauvre, ô fortune imprévue,
M’écriai-je aussitôt, ne crois pas m’étonner.
Trois fois sainte Fortune, et trois fois bien venue !
Toi qui me viens de Dieu, tu vas y retourner.
Ainsi prenant cet or, et courant dans la rue,
Au premier mendiant je m’en fus tout donner.

xlv.

Lecteur, si je n’ai pas la mémoire égarée,
Je t’ai promis, je crois, en commençant ceci,
Une bonne fortune : elle finit ainsi.
Mon bonheur, tu le vois, vécut une soirée ;
J’en connais cependant de plus longue durée
Que je ne voudrais pas changer pour celui-ci.


Alfred de Musset