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SHAKESPEARE

Le morceau suivant, que M. de Châteaubriand a bien voulu détacher, à notre prière, des épreuves de son Essai sur la Littérature anglaise qu’il corrige en ce moment, fait partie d’une appréciation complète de Shakespeare ; nous aurions désiré la pouvoir obtenir tout entière ; mais M. de Châteaubriand revoyait encore les chapitres qui se rapportent aux drames. On s’apercevra assez, en lisant ces pages, de la grandeur du dessein, et combien une telle critique si neuve, si créatrice, s’égale doublement à l’immensité du modèle et à la majesté du peintre. M. de Châteaubriand, en nous montrant Milton qui jugeait en son temps Shakespeare, Michel Ange qui exalte et envie le destin de Dante, le Tasse qui célèbre Camoëns, nous fait saluer cette société d’illustres égaux, se révélant les uns aux autres dans une langue d’eux seuls connue. Lui aussi, il est de cette société ; il est l’un des sept ; il parle cette langue. René et Hamlet, face à face, ont reconnu de bonne heure les éclairs fraternels de leurs fronts. Jeune et au début, M. de Châteaubriand avait déjà écrit de la poésie anglaise et de Shakespeare ; il reprend aujourd’hui, il renouvelle et agrandit son discours. Il fait ici pour sa critique ce qu’il fait pour toute sa vie et pour toutes ses œuvres dans ses admirables Mémoires ; il recommence et il achève. Il ressaisit le tout dans un cadre élargi ; il enserre et referme sa marche harmonieuse dans un cercle d’or.