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l’exemple, et que le général provoquait à ces sanglantes orgies ? car, ayant su que parmi les troupes qui défendaient Zacatécas il se trouvait quatre ou cinq officiers étrangers, il avait donné l’ordre que l’on massacrât tous les officiers prisonniers, afin que ceux-ci ne pussent lui échapper. Cet ordre barbare avait animé ses sicaires contre le reste des étrangers, qui, paisiblement établis dans la ville, n’avaient pris aucune part aux événemens.

Au milieu de ces troubles populaires qui agitent presque continuellement ce malheureux pays, la vie des Européens se trouve à chaque instant compromise. Quand ils se rencontrent sur le théâtre de ces événemens politiques, il ne leur reste qu’à s’enfermer chez eux, et tandis que la populace et une soldatesque effrénée vocifèrent des menaces contre eux, munis de fusils, de pistolets, et bien approvisionnés de cartouches, ils attendent, dans des angoisses mortelles, déterminés à vendre le plus chèrement possible leurs biens et leur vie. Oui, les étrangers sont, dans ce pays, sans défense et sans protection : les représentans de leurs gouvernemens ne font absolument rien pour leur sûreté. Quand un Européen a été pillé, volé ou assassiné, non par des voleurs de grand chemin, mais par des colonels ou des généraux, comme à Zacatécas, le ministre de la nation à laquelle il appartient se borne à faire, de la manière la plus polie, quelques représentations insignifiantes au président de la république, et cette démarche reste presque toujours sans effet. Mais la faute n’en est-elle pas à nos gouvernemens, qui envoient pour les représenter dans ce pays, des hommes sans énergie, sans dignité, des hommes de bureau qui ne voient dans leurs fonctions que les agrémens qu’elles procurent et l’argent qu’elles rapportent ? Et ce n’est plus aujourd’hui seulement la populace mexicaine qui insulte et maltraite les étrangers : cette animosité est partagée par ceux-là même qui devraient s’étudier à détruire les préjugés qu’on nourrit contre eux. Quelle peut être leur sécurité, quand les journaux du pays et les pièces officielles, que publient les dépositaires de l’autorité, ne cessent d’envenimer les mauvaises passions de la populace, en leur prodiguant la menace et l’injure ? Pense-t-on que leur amour-propre national n’ait pas à souffrir, lorsque dans ces assemblées qu’on appelle pompeusement, au Mexique, soberanos congreros, ils entendent un stupide vaquero se permettre d’insulter la veja Europa ? Un des pères