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tagion morale, heureux si les difficultés intérieures, la peur d’un surcroît de dépenses et de tout mouvement extraordinaire, empêchent ce cordon sanitaire de se changer en intervention offensive.

Éclairée par l’expérience, la révolution espagnole doit se tenir sur ses gardes. Qu’elle n’oublie rien de la première phase de son histoire, du premier acte de son drame. Les évènemens de la précédente époque constitutionnelle, comprise entre 1820 et 1823, sont connus et appréciés. Il est inutile d’y revenir, si ce n’est pour conseiller de ne point les perdre de vue. Mais, pour que l’expérience soit complète, il faut remettre en mémoire une autre époque, moins connue, quoique plus rapprochée, et dont les enseignemens doivent être encore plus instructifs et plus éclatans ; je veux dire, le temps écoulé depuis la révolution de juillet, et qui a vu l’Espagne s’avancer peu à peu de l’absolutisme à la constitution quasi-républicaine de 1812. Cette époque, je vais essayer de la retracer sommairement. Acteur dans les évènemens qui signalèrent les premières agitations de l’Espagne, lié d’amitié personnelle avec la plupart des hommes que l’on y a vus successivement à la tête des affaires et des armées, ayant assez la connaissance de ce pays et de son histoire pour avoir pu, dans quelques écrits, rappeler des choses oubliées de ses voisins et presque de lui-même ; peut-être m’est-il permis de me présenter, en fidèle allié des patriotes espagnols, dans la lutte qu’ils peuvent avoir à soutenir contre la politique doctrinaire.

La révolution de juillet fut saluée par tous les peuples opprimés comme une aurore de délivrance. Les réfugiés espagnols surtout durent croire qu’après l’attentat politique de 1823, qui les avait chassés de leur pays, la France, libre à son tour, devait, par justice et par intérêt, rendre à l’Espagne la liberté qu’elle lui avait ôtée. Aux premières nouvelles de la victoire des trois jours, ils accoururent à Paris de tous les points de l’Europe, et bientôt une réunion s’y forma, une espèce de junte, composée de toutes les sommités de l’émigration libérale, anciens ministres, députés aux cortès, généraux, conseillers d’état, etc. ; je citerai seulement ceux qui, depuis lors, ont joué des rôles importans dans les affaires de leur pays, le comte de Toreno, MM. Mendizabal, Isturiz, Galiano, Angel Saavedra (duc de Rivas), Calatrava, Gil de la Cuadra, Torrès, San-Miguel, Seoane, etc. Cette