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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
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14 mars 1838.


Nous avons, depuis quelques jours, sous les yeux un spectacle fait pour apprendre, en peu de temps, tous les secrets de la vie parlementaire aux nouveaux membres de la chambre des députés. Assurément, il y aura de la mauvaise volonté de la part de ceux qui ne sauront pas à quoi s’en tenir sur le désintéressement, le dévouement au roi et la fermeté des principes de quelques-uns de leurs graves et éminens collègues, qui les avaient peut-être édifiés jusqu’à ce jour. Cette comédie avait été parfaitement jouée, il est vrai, pendant deux mois ; mais il paraît que ceux qui y avaient pris des rôles l’ont trouvée eux-mêmes un peu longue, et voyant venir le moment où tant de semblans de gravité seraient perdus, sans résultat pour eux, ils ont jeté le masque et montré leurs passions à découvert. La transformation a même été si subite, que quelques députés peu faits à ces reviremens, que quelques nouveaux-venus naïfs, doivent chercher autour d’eux leurs collègues d’hier, sans les reconnaître dans les personnages actuels.

Nous sommes loin de blâmer le parti doctrinaire des efforts qu’il fait dans ce moment. Il est logique, en quelque sorte, qu’un parti composé d’hommes actifs, remuans, ambitieux, qu’un parti qui ne dédaigne aucun moyen de se maintenir au pouvoir quand il s’y trouve, use aussi de tous les moyens qui se présentent à lui pour y remonter quand il en est dépossédé. C’est peut-être la seule identité de vues qui se trouve dans les doctrinaires au pouvoir et les doctrinaires hors du pouvoir. Autrement, il y a deux hommes dans chaque membre de ce parti. Hors du pouvoir, les libertés du pays n’ont pas de plus chaleureux défenseurs ; au pouvoir, leur présence se signale toujours par des attaques officielles contre ces libertés, et à la fois par des menaces, faites en leur nom, contre les droits qu’ils se réservent d’attaquer plus tard. L’histoire du parti peut être faite tout entière sous ce double point de vue, et les pages qu’il vient d’y ajouter cette semaine le présenteront de nouveau, à qui sait y lire, sous ces deux faces diverses.

À l’approche de la discussion des fonds secrets, où l’existence du ministère actuel devait être mise en question, une grande fermentation se faisait sentir dans le parti doctrinaire. Déjà, il y a peu de temps, M. Guizot avait