Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 14.djvu/459

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
455
REVUE. — CHRONIQUE.

sions politiques et d’un désordre social ? Le pays est calme, les esprits sont tranquilles, de l’aveu de M. Guizot ; il se plaint même de l’excès d’insouciance qu’il voit autour de lui ; et c’est de sa plume que partent les attaques les plus virulentes qui aient retenti dans la presse depuis un an. Voilà donc l’exemple que nous donnent les capacités qui réclament le pouvoir et la direction de la société, les hommes de talent qui s’indignent de ne pas être ministres, eux qui, descendant à leur ancienne profession de journaliste, ne savent même pas la remplir avec la dignité et la noblesse qui peuvent seules la relever !



CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



La discussion de la conversion des rentes s’ouvrira de nouveau dans deux jours. Les difficultés de cette opération capitale ont été exploitées avec beaucoup d’ardeur et d’habileté. Pendant la suspension des débats de la chambre, on s’est efforcé de répandre le bruit de certaines divisions qui se seraient introduites dans le sein du ministère. On a cherché à lui aliéner les feuilles qui ont défendu la cause des rentiers. C’est une tactique qui n’est pas neuve, et il ne faut pas s’en étonner.

Le fait est qu’il n’y a pas eu de divisions dans le conseil, et que la discorde n’a pas régné un seul moment entre ses membres. On ne saurait appeler des divisions les avis, toujours différens, qui se discutent autour de la table d’un conseil. Qu’on se rappelle le ministère du 11 octobre, et ses discordes qui ont fini si souvent par des modifications de ministère. C’étaient là, sans doute, des divisions véritables. Les démissions se donnaient et se reprenaient presque chaque jour ; mais ce temps n’est plus, et les dissensions du ministère sur les moyens d’exécution de la conversion étaient si peu graves, que c’est démontrer la bonne harmonie du cabinet, que de ne pas les dissimuler.

Dans toute discussion politique, il y a toujours des situations qui diffèrent, ne fût-ce que par quelque nuance. Dans celle-ci, la couronne, le ministère et la chambre occupent des positions diverses. La couronne ne pouvait se prêter avec empressement à une mesure impopulaire à Paris, dont les avantages pour les départemens ne sont pas bien démontrés, et qui touche de si près au bien-être de la capitale. On ne doit donc pas s’étonner si son ascendant bien légitime, bien admis et bien reconnu par tous ceux qui ont occupé le ministère depuis 1830, a été de quelque poids dans l’examen des causes qui faisaient désirer l’ajournement de la mesure.

Quant au ministère, il n’était pas unanime sur cette question, et sans qu’il s’y manifestât des oppositions vives, les opinions étaient partagées. Qui dit un ministère dit une assemblée d’hommes éclairés, expérimentés, instruits des difficultés des affaires, et par conséquent pourvus de toutes les qualités