Si je vous quitte le dernier,
N’en tirez pas grand avantage :
Je fus dégoûté le premier.
Dans la première scène de Mademoiselle de Belle-Isle, la marquise de Prie, attendant Richelieu, ne pourrait-elle pas trouver ce sonnet-là sur sa toilette, comme à-propos ? Saint-Pavin en a donné une quantité d’aussi jolis, d’aussi aiguisés : il ne se laissait pas faire[1]. Boileau l’a touché et y a attrapé sa piqûre. Il espérait l’avenir pour ses vers : rendons-le-lui du moins, autant qu’il nous est possible, en les goûtant.
- ↑ Il a dit lui-même de son esprit :
Je l’ai vif dans les reparties
Et plus piquant que les orties.Il eut fort souvent affaire aux coquettes et s’en vengea : on vient de voir ce qu’il dit à l’une ; voici pour une autre :
Le changement vous est si doux,
Que, quand on est bien avec vous,
On n’ose s’en donner la gloire.
Celui qui vous peut arrêter
A si peu de temps pour le croire,
Qu’il n’en a pas pour s’en vanter.À une dévote un peu tendre, mais qui ne l’était pas assez :
N’écoutez qu’une passion :
Deux ensemble, c’est raillerie.
Souffrez moins la galanterie,
Ou quittez la dévotion…
Tout le monde se met en peine
De vous voir toujours incertaine
Sans savoir à quoi vous borner.
Vous finirez comme une sotte :
Vous ne serez jamais dévote,
Vous ne pourrez jamais aimer.Mais voici peut-être l’épigramme en ce genre la plus sanglante, et je la cache tout au bas :
Vous voulez en femme d’honneur
Me refuser le point suprême !
Vous marchandez à qui vous aime
L’entier abandon du bonheur.
Mais allez, vous avez beau faire
Et triompher d’un air sévère
Quand de là je reviens battu.
Au lieu du tout, si l’on ne donne
Qu’une moitié de sa personne,
On n’est qu’une demi-vertu.M. de Monmerqué possède beaucoup de vers inédits de Saint-Pavin.