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REVUE. — CHRONIQUE.

Il lui appartenait de défendre sans embarras et sans hésitation une mesure qu’il avait adoptée, et contre laquelle, avant les inspirations hostiles de la commission de la chambre, il n’avait pas élevé d’objections.

Le droit des chambres, c’est le vote annuel des contingens de l’armée. Quant à l’effectif, qu’il ne faut pas confondre avec le contingent, et aux formes de l’organisation, les chambres en ont sans doute le contrôle, par cela seul que toute organisation suppose et entraîne une dépense, dépense que les chambres sont libres d’accorder ou de refuser ; mais il n’y a rien d’inconstitutionnel en soi à appeler sous les drapeaux le contingent voté et à modifier par ordonnance l’organisation de l’armée. Les faits d’administration sont matière de responsabilité, comme tout acte quelconque de gouvernement, mais n’ont rien d’inconstitutionnel, rien qui porte atteinte aux prérogatives de la chambre. C’est un acte de gouvernement qui peut être bon ou mauvais, opportun ou intempestif, digne d’éloges ou digne de blâme, selon les circonstances ; un acte qui peut donner lieu à l’accusation des ministres, mais qui ne touche point aux droits de la législature. Il n’en serait pas de même si une ordonnance venait modifier les règles de la loi sur les appels, l’avancement, l’état des officiers, leur activité, leur disponibilité, leur réforme, leur retraite. Il y aurait alors usurpation, empiétement. Sur ces matières, le droit de la législature est direct ; elle n’intervient pas seulement par droit de contrôle, à l’aide du budget.

La liberté du vote ! c’est un argument qui nous conduirait fort loin. Il s’appliquerait, avant tout, aux négociations diplomatiques, aux traités. On pourrait dire avec plus de raison qu’on ne le dit d’un fait d’administration intérieure : Pourquoi présenter aux chambres un traité déjà conclu, signé, en certains cas ratifié ? C’est un fait accompli, le vote n’est pas libre. On n’ose pas rendre vaine la signature du roi ou celle de ses représentans. — Faudra-t-il donc initier les chambres aux négociations pendantes, et leur demander un assentiment préalable ?

Au reste, n’insistons pas trop. Nous pourrions bien, par le vent qui souffle, rencontrer des hommes se disant sérieux, voire même conservateurs par excellence, qui nous prendraient au mot. Ils trouveraient peut-être qu’une consultation diplomatique à huis-clos, en comité secret, qu’une confidence déposée dans l’oreille de six ou sept cents législateurs, ne serait pas un expédient à dédaigner. On en rencontrerait un plus grand nombre encore qui trouveraient bon, que le gouvernement fût obligé, avant de conclure un traité, de consulter du moins une commission de la chambre.

Ce qu’on veut aujourd’hui, le but vers lequel on marche à grands pas, les uns le sachant et le voulant bien, les autres parce que

E l’una fa quel che le altre fanno,

c’est l’administration du pays par la chambre, ou, pour mieux dire, par les commissions de la chambre. Nous revenons à la polysynodie, et à la moins heureuse des polysynodies ; car le tirage au sort des bureaux rend toujours plus