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de 5 liv. st. par an. « C’est, ajouta-t-il, le principe de la loi anglaise, et j’espère que sur ce terrain les deux grandes fractions qui se divisent la chambre pourront se rencontrer et signer la paix. »

Que lord Howick eût réellement cet espoir, ou que ce fût de sa part une simple précaution oratoire, toujours est-il que ni l’une ni l’autre des grandes fractions auxquelles il faisait appel, ne se tint pour satisfaite. Le ministère, ainsi qu’on devait s’y attendre, combattit un amendement qui bouleversait son système, et M. O’Connell, déjà mécontent de la concession inutilement offerte aux tories, se prononça avec énergie contre cet amendement. Quant aux tories, ils agirent fort habilement. Sans se lier aux détails de la proposition de lord Howick, ils en acceptèrent le principe, et, par cette manœuvre, votèrent avec lui contre le ministère, tout en se réservant la faculté si cela devenait nécessaire, de voter le lendemain avec le ministère contre lui. L’amendement, ainsi soutenu par sir Robert Peel et par lord Stanley, passa à la majorité considérable de 291 voix contre 270.

Après cet échec irréparable, il ne restait plus au ministère qu’à abandonner le bill. Le ministère pourtant ne prit point ce parti, et le lendemain commença une scène parlementaire dont, pour l’honneur de lord John Russell et de ses collègues, il est à désirer que le souvenir s’efface promptement. Pour quiconque avait écouté la discussion de la veille, il était clair qu’en adoptant l’amendement Howick, la chambre venait de repousser le principe du bill de lord Morpeth, et la vivacité avec laquelle lord John Russell lui-même avait combattu cet amendement prouve qu’il ne s’y était pas mépris. Le lendemain pourtant il vint déclarer qu’après y avoir réfléchi, le gouvernement était d’avis que l’amendement de lord Howick n’avait rien d’inconciliable avec la clause primitive. L’amendement Howick, en effet, assurait le droit électoral à quiconque possédait un intérêt annuel de 5 liv. st. en sus du fermage et des charges ; mais il n’empêchait pas qu’à cette classe d’électeurs on n’en ajoutât une autre, composée de tous les occupans depuis quatorze ans d’une terre évaluée à un revenu imposable de 8 liv. st. Le ministère adoptait donc la clause de lord Howick, et persistait dans la sienne. Ainsi entendu, le vote de la veille élargissait la franchise électorale au lieu de la restreindre, augmentait le nombre des électeurs au lieu de le diminuer.

Une telle manœuvre eut le sort qu’elle méritait, et tourna promptement à la confusion de ses inventeurs. Lord Howick annonça d’abord qu’il ne pouvait comprendre le vote de la chambre comme le minis-