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DE LA CRISE ACTUELLE EN ANGLETERRE.

indigène était à 54 sh. (24 fr. 50 c. l’hect.), le blé étranger ne pouvait entrer sans payer un droit de 32 sh.d. (14 fr. 90 c. l’hect.). À chaque 1 sh. (46 c. l’hect.) d’augmentation sur le prix du blé jusqu’à 67 sh. (30 fr. 25 c. l’hect.), le droit diminuait de 1 sh. (46 c. l’hect.). Il diminuait de 2 sh. (92 c. l’hect.) jusqu’à 69 sh. (31 fr. 40 c. l’hect.), de 3 sh. (1 fr. 38 c. l’hect.) jusqu’à 71 sh. (32 fr. 25 c. l’hect.), de 4 sh. enfin (1 fr. 84 c. l’hect.) jusqu’à 73 sh. (33 fr. 20 c. l’hect.). En comparant les deux bills, on voit qu’à 59 sh. (26 fr. 80 c. l’hect.) et à 73 sh. (33 fr. 20 c. l’hect.), le droit Wellington est le même que le droit Canning. Entre 59 et 73 sh., le droit Wellington est un peu plus élevé. C’est encore la loi de 1828 qui régit la matière aujourd’hui.

Ce qu’il est bon de remarquer, c’est qu’en 1827 et 1828 le droit gradué était fort en faveur, et que les radicaux les plus décidés allaient à peine aussi loin que le ministère Melbourne. Le plus grand économiste de l’époque, M. Ricardo, se bornait à demander un droit fixe qui descendît graduellement jusqu’à 10 sh. (4 fr. 50 c. l’hect.). Mais M. Canning repoussait vivement une telle innovation, et quand M. Hume en faisait le sujet d’un amendement, 140 voix contre 16 rejetaient dédaigneusement sa proposition. La loi de M. Canning et même celle du duc de Wellington n’en parut pas moins à l’opinion libérale une conquête importante, et à l’intérêt agricole un échec sérieux. Personne alors, si ce n’est un petit nombre d’esprits forts, n’osait envisager la question sous son véritable jour, et déclarer nettement que le consommateur ne devait pas payer au propriétaire foncier la plus injuste des taxes, une taxe qui, en évaluant à 8 ou 10 sh. par hect. l’augmentation du prix des céréales, n’impose pas à la population un sacrifice moindre de 5 à 600 millions par an.

Après le bill de réforme, quand l’opinion radicale parla plus haut et plus ferme, la taxe du bill fut exposée à de plus rudes attaques, et une association se forma tout exprès pour en provoquer et en poursuivre l’abolition. Les masses populaires aussi commencèrent à s’en préoccuper sérieusement, surtout dans les grandes villes manufacturières, et tout le monde se souvient des étranges processions où l’on portait deux pains de prix égal, l’un anglais, tout petit, l’autre polonais, d’un volume double ou triple. Nécessairement un tel symbole devait frapper l’esprit du peuple, malgré les beaux raisonnemens par lesquels on cherchait à lui démontrer qu’il gagnait beaucoup à n’acheter avec la même somme d’argent qu’une livre de pain au lieu de deux. La question des céréales devenait donc, en dehors du parlement, une question vivante et actuelle, mais, dans le parlement même, elle se