Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 28.djvu/192

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
188
REVUE DES DEUX MONDES.

toutes les lois proposées, et c’est surtout au gouvernement qu’il appartient de donner au conseil d’état force et grandeur.

Mais la loi doit intervenir pour le règlement des attributions, et une connexité palpable existe entre les attributions et l’organisation ; la loi peut donc régulièrement s’appliquer aux deux choses. L’usage que le gouvernement a fait du droit de réglementer le conseil d’état n’a pas été assez heureux pour que le pouvoir législatif n’intervienne pas, afin de poser au moins quelques principes. C’est ainsi que les abus administratifs provoquent l’action législative : l’extension exagérée des cadres de l’état-major de l’armée a rendu une loi nécessaire ; la prodigalité dans les décorations de la Légion-d’Honneur a éveillé l’initiative de la chambre des pairs. Les chambres sont disposées à s’en rapporter beaucoup au pouvoir exécutif, mais, quand elles le surprennent faisant un mauvais emploi de l’autorité qu’elles lui laissent, l’intérêt public les pousse à la ressaisir ; s’il leur arrivait d’empiéter sur les attributions de la couronne, on peut être assuré qu’elles ne commettraient cet excès qu’après quelque faute du gouvernement, et il devrait s’imputer à lui-même l’amoindrissement de son pouvoir.


L’organisation, ou, selon les termes du projet de 1839, la composition du conseil d’état comprend tout ce qui concerne le personnel ; elle soulève des questions de détail assez nombreuses et qui ne sont pas dépourvues d’importance. Quel sera le nombre des conseillers d’état, maîtres des requêtes et auditeurs ? quelles seront les conditions d’aptitude, les formes de révocation ? Avec quelles autres fonctions le service du conseil d’état sera-t-il incompatible ? À quel ministre la présidence appartiendra-t-elle ? Je ne dirai rien sur ces divers points dont l’examen m’entraînerait trop loin, mais il est deux autres questions que leur importance ne permet point de passer sous silence, car l’une intéresse la dignité et le mode de délibération du conseil d’état, et l’autre l’avenir de l’administration : je veux parler du service extraordinaire et des auditeurs.


L’origine de ce qu’on appelle le service extraordinaire, dénomination qui n’existe qu’au conseil d’état, est fort connue. Sous l’empire, les membres appelés à des fonctions extérieures ne les acceptaient jamais sans esprit de retour, et tenaient à honneur de rester attachés par un titre à ce corps alors si puissant. On les y conservait en service extraordinaire. Ils ne prenaient part à aucune délibération. Le nombre des conseillers d’état qui se trouvèrent dans ce cas varia de