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Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 7.djvu/849

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Il donne précisément par là gain de cause à la politique anti-francaise de M. Nothomb. Vous voyez bien que la France ne veut pas de nous, disent les partis politiques au parti industriel. — Revenons à la Prusse, ajoutent les libéraux. — Isolons-nous, s’écrient les catholiques. Et notez que la convention, ainsi négligée par notre cabinet, passait en Belgique pour trop favorable aux intérêts français. La convention, quelle qu’elle fût, aurait dû être conclue, parce qu’arrivant après les représailles de la Prusse, elle aurait produit le meilleur effet sur l’opinion belge, et aurait fortifié le parti industriel dans ses préférences pour l’alliance française. C’est donc une faute très grave que M. Guizot vient de commettre.

Peut-être notre gouvernement se flatte que tout rapprochement de la Belgique et du Zollverein est désormais impossible. Il aurait tort : sans doute les bases de l’alliance avec le Zollverein sont inacceptables encore, telles que les a présentées jusqu’à ce jour le gouvernement belge ; mais il faut craindre, qu’on ne finisse par trouver de part et d’autre une nouvelle combinaison et que l’on ne se relâche à la longue sur les points en litige. Déjà la Gazette d’Augsbourg parle d’un projet qui ferait d’Anvers un port du Zollverein ; c’est une pensée que le gouvernement belge poursuit depuis 1834, la création du chemin rhénan l’indique assez. Il n’est pas impossible qu’il parvienne enfin à l’accomplir. Les besoins de l’industrie n’en resteraient pas moins à satisfaire, les grands débouchés qu’elle demande seraient encore à trouver ; mais le gouvernement belge pourra obtenir d’elle qu’elle prenne patience, en la leurrant de l’espoir d’amener un jour le Zollverein à de plus amples concessions.

L’occasion qui s’offre aujourd’hui à la France de se concilier l’affection de la Belgique, de reprendre sous une autre face le projet d’union douanière, petit donc nous échapper d’un moment à l’autre. Le ministère a eu un premier tort dans cette circonstance, c’est d’abandonner la négociation ouverte au commencement de ce mois au sujet de l’abaissement de certains articles des tarifs français et belges ; il en commettrait un plus grand s’il ne se hâtait de réparer cette faute, et de prendre en outre un parti dans la question de l’alliance commerciale avec la Belgique. Qu’il étudie bien les documens que la querelle des cabinets de Bruxelles et de Berlin vient de faire connaître, il verra que toute la difficulté du problème a porté sur le droit à l’entrée des fers et des fontes belges. Dans un traité avec la France, la difficulté est la même ; eh bien ! si l’on est convaincu de la nécessité d’arracher la Belgique à l’influence de la Prusse, si l’on comprend, comme nous, que l’union douanière, préparée de longue main, pourra enfin s’accomplir, il faut que l’on soit bien persuadé aussi qu’il y a un point qui prime tous les autres dans la question : c’est qu’il faut que la France fasse une grande concession sur les fers et sur les fontes belges.

En se plaçant au-dessus des petits intérêts d’existence ministérielle qui lui font craindre le mécontentement des industries métallurgiques, le cabinet