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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/1094

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REVUE DES DEUX MONDES.

au profil droit et pur, d’un caractère antique, avec une coiffure inconnue et une barbe longue et frisée. Elle indiquait un genre de sculpture d’un style nouveau, se rapprochant cependant de celui de Persépolis. Elle avait un relief assez saillant, et devait appartenir à un corps de près de trois mètres. Ceci était plus qu’un indice, c’était une véritable découverte ; la pierre était grande, elle devait supporter plusieurs figures ; on voyait le haut d’autres blocs ; il était présumable qu’il y en avait beaucoup, à en juger surtout par l’étendue du monticule et la forme qu’il présentait au-dessus du point attaqué.

Cependant on n’était qu’au commencement des fouilles ; à peine savait-on sur quoi on travaillait ; que pouvait-on préjuger de toute cette terre si muette, si sourde jusqu’alors aux invocations des antiquaires ? L’espérance était-elle raisonnable ? Déjà elle semblait logique, et l’avenir prouva qu’elle était juste. Le point de départ paraissait favorable, puisque du premier coup de pioche on avait mis à nu un amas de pierres, renversées il est vrai, mais sculptées. On continua l’opération, et on suivit la petite tranchée qu’on venait d’ouvrir. De ce moment, M. Botta marcha de découverte en découverte, de surprise en surprise. Toutes les pierres étaient sculptées, elles annonçaient une suite de bas-reliefs, et l’on ne tarda pas à reconnaître que l’on avait entamé une muraille dont la base, encore en place, complétait les figures dont on avait arraché si péniblement les premiers fragmens. Un peu plus loin, on trouva que la muraille tournait à angle droit, puis elle tourna encore. On crut à une porte ; on s’en assura en perçant sur le côté, et l’on découvrit l’autre paroi : c’était en effet une porte. Alors il devait y avoir le prolongement du premier mur ; on le chercha et on le trouva. Après l’avoir suivi sur une longueur égale à celle que l’on avait déjà, on retrouva encore un angle droit symétrique du premier, et le mur se continuait dans une nouvelle direction parallèle à celle du premier mur découvert. On était donc dans une salle. Mais cette porte que l’on avait ouverte, où conduisait-elle ? Elle menait à une autre muraille couverte également de sculptures. Décidément, on tenait une bonne veine, et l’on commençait à comprendre l’espèce et l’arrangement des monumens que l’on cherchait.

Les premiers pas faits dans les tranchées que l’on avait ouvertes avaient été incertains. On avait beaucoup tâtonné, car on ne savait par quel bout attaquer ; et puis, si l’on n’était pas dans une bonne voie, tout manquait, on ne trouvait plus ; il fallait changer de direction, quelquefois revenir sur ses pas. Ce que je raconte là a été le travail de plus d’un mois ; la terre était dure, les ouvriers novices, la main