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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/1152

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Peu de jours après l’installation des nouveaux ministres, le 25 mars 1801, Grey demanda une enquête sur l’état du pays. Il attaqua vivement toute la politique du cabinet démissionnaire, politique dont les conséquences se résumaient, suivant lui, en 270 millions sterling ajoutés à la dette publique, et en 17 millions de taxes nouvelles. Il manifesta une vive admiration pour le premier consul, et fit même l’éloge de la confédération maritime du Nord, qui n’était pas encore dissoute à cette époque. Il blâma Pitt d’avoir pris envers les catholiques d’Irlande, à l’insu du roi, les engagemens qui étaient devenus le motif de sa démission. Ces accusations, appuyées par Whitbread, furent longuement réfutées par Dundas. Aux sacrifices que l’Angleterre avait dû subir, il opposa les avantages dont ils avaient été le prix ; il rappela 78 vaisseaux de ligne, 181 frégates, 234 autres bâtimens de guerre de moindre grandeur enlevés à la France, détruits ou conduits dans les ports anglais, sans compter plus de 800 navires appartenant à des particuliers, sans compter 76 vaisseaux espagnols et 15 vaisseaux hollandais, auxiliaires de la marine française. Il contesta d’ailleurs l’exactitude des considérations dans lesquelles Grey était entré sur les causes de la dissolution du précédent ministère. C’était à Pitt qu’il appartenait naturellement de traiter cette dernière question : il prit la parole après Dundas. Tout en niant de la manière la plus absolue qu’il eût jamais fait aucune promesse aux Irlandais, tout en se défendant d’avoir jamais pensé à une prétendue émancipation des catholiques, expression qu’il repoussait de toutes ses forces parce qu’elle supposait une injustice à réparer, un droit à reconnaître, il répéta qu’à titre de libéralité, de convenance, et moyennant des garanties pour la religion anglicane, il avait voulu admettre ces mêmes catholiques à quelques avantages dont ils étaient encore privés. Il protesta que son intention positive était toujours de faire pour eux, en temps opportun, tout ce qui serait compatible avec le maintien de la tranquillité publique. Il refusa d’en dire davantage sur les causes qui l’avaient décidé à se retirer, repoussant comme une doctrine dangereuse pour la monarchie celle qui dénierait au roi la faculté de changer ses conseillers et aux ministres le droit de se séparer de la couronne sans révéler hautement les motifs de leur retraite. Il vanta la sagesse, la capacité des membres du nouveau cabinet, et reprocha à plusieurs de ses amis de ne pas leur témoigner toute la confiance dont ils étaient dignes. La motion de Grey fut rejetée par une majorité de 186 voix. La majorité qui rejeta, à la chambre des lords, une motion analogue, fut proportionnellement aussi forte.