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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/147

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Allons plus loin : la conversion en 3 et demi n’est pas actuellement praticable, à moins de combinaisons irrégulières, exceptionnelles, parce que ce dernier fonds n’a pas atteint le pair ; mais, si le gouvernement français s’était montré aussi attentif à réaliser, par les conversions, toutes les économies possibles, qu’il s’est montré habile à les repousser ou à les éluder, rien ne l’empêchait de fractionner davantage l’échelle de nos rentes, de la diviser par quarts d’unités, et, par exemple, de créer, entre le 3 et demi et le 4, un 3 trois quarts pour 100. Rien de plus raisonnable, rien de plus nécessaire même, quand le crédit public, une fois parvenu à un certain degré d’élévation, ne peut plus faire que des progrès presque insensibles. Supposons que ce dernier fonds existe : à quel taux s’élèverait-il ? En prenant toujours pour point de départ le cours actuel du 3, et faisant la proportion, on trouve qu’il atteindrait aujourd’hui 106 francs. Voilà donc un titre qui serait lui-même proposable à la place d’un remboursement au pair, puisqu’il laisserait encore, à ceux qui l’accepteraient de préférence, un bénéfice de 6 francs par chaque coupon de rente.

Certes, s’il s’agissait d’un fonds peu considérable, ou seulement d’une importance moyenne, dont le capital ne s’élevât, par exemple, qu’à 5 ou 600 millions, cette conversion en 3 trois quarts serait la chose du monde la plus naturelle et la plus simple. À ce taux, elle offrirait déjà aux rentiers des avantages si évidens, si clairs, relativement au remboursement, que nul n’hésiterait à l’accepter. Entreprise d’ailleurs sur une semblable échelle, l’opération ne serait pas de nature à exercer sur les fonds une dépression sensible, et il serait toujours facile de se mettre en garde contre les évènemens imprévus. Mais il s’agit d’un capital de 2 milliards et demi, et son importance seule est peut-être un motif pour qu’on y regarde à deux fois. Offrir à ses créanciers le remboursement éventuel d’une pareille somme est chose grave. Par cela même que ce remboursement est irréalisable au fond, il ne suffit même pas que la conversion offerte à sa place présente aux créanciers des avantages clairs, évidens et très palpables. Il faut encore qu’il existe, entre le cours actuel du nouveau fonds et le pair, une marge assez grande, pour que les fluctuations qui surviendraient, et un léger ébranlement du cours, ne suffisent pas pour changer les conditions du marché. Le 3 3/4 vaut aujourd’hui 106 francs, à la bonne heure, et nous, rentiers, nous l’accepterons de préférence à un remboursement au pair ; mais une opération comme celle qui nous occupe ne s’achève pas en un jour. Qu’arrivera-t-il si, pendant qu’elle se poursuit, les fonds fléchissent, et que de 106, chose possible, ils tombent seulement à 103 ? À ce point même, il est vrai, l’avantage de la