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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/177

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ce que nul ne peut définir exactement. Ces changemens oscillent dans des limites que la science même s’avoue impuissante à déterminer. L’expérience démontre bien qu’une plante soustraite aux conditions de la nature, enlevée de son climat et placée sous la main de l’homme, subit des altérations graves qui vont souvent jusqu’à masquer sa forme première ; elle démontre aussi que cette même plante, remise dans son milieu primitif, reprend peu à peu ses anciens caractères et redevient ce qu’elle était auparavant. Ce fait est curieux, mais on peut conclure qu’il ne conclut rien ; car la question subsiste entière de savoir si c’est la force interne du végétal ou l’action des causes primitives renouvelée qui a déterminé son retour au type originel. La vérité est que tous les physiologistes reconnaissent des cas où les types se conservent, et d’autres où ils se dénaturent. Il se passe pour les races, dans la formation historique, quelque chose d’analogue à ce qui eut lieu pour les êtres organisés dans la grande époque de formation terrestre ; il se rencontre des types qui résistent et se rompent, des types qui survivent intacts aux grandes secousses des évènemens, des types qui cèdent. Il n’est donc point impossible de faire sortir une race de l’orbite qui lui est tracé par la nature, et de l’entraîner dans le mouvement d’une autre race. Mais ce qui est encore plus certain et plus reconnu, c’est la production de types nouveaux sortant du contact de deux races en présence. Du nombre des élémens constitutifs d’un peuple et du degré de leur association résulte, pour ainsi dire, la forme qui lui est propre. Plus la race est pure, plus son organisation sociale est simple, plus sa vie intellectuelle et son existence comme nation est limitée. Ces races, en quelque sorte rudimentaires, se compliquent et se perfectionnent par le croisement avec d’autres groupes du genre humain. Leurs caractères, en se mêlant, donnent naissance à une infinité de nuances intermédiaires. Plus un peuple acquiert ainsi d’élémens, plus il s’élève : son organisation sociale s’étend, ses fonctions s’accroissent, et à mesure que les caractères de la population se surajoutent les uns aux autres, sa vie augmente. Les élémens sont d’abord désunis ; mais le temps en opère la fusion, et pendant que cette fusion s’opère, des développemens nouveaux se manifestent, l’éducation achève de faire disparaître les différences morales et organiques qui étaient un obstacle au progrès. C’est ainsi que la nature, avec un très petit nombre de races primitives, a pourvu par la variété infinie des croisemens à la perfectibilité matérielle des sociétés.

L’étude ethnographique du globe nous présente la grande division