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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/181

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La couleur de la peau a suivi les mêmes variations. La plupart des historiens grecs et latins nous peignent les Celtes comme très blancs ; Ammien Marcellin ne revient pas de la blancheur lactée des femmes gauloises : cette première teinte s’est changée en rouge, puis une couleur plus sombre est venue brunir l’éclat sanguin. Des changemens encore plus considérables, et dont l’importance s’accroît, semblent avoir agi sur le volume, sur la forme et sur le développement de la tête. M. Frère vient de concéder au Muséum du Jardin des Plantes une collection de crânes retrouvés dans des fouilles et appartenant aux différeras âges de notre nation : ces monumens d’une nouvelle espèce nous montrent l’empreinte de la loi du progrès sur l’organisation humaine.

Le mouvement n’est pas le même pour toutes les variétés, chaque groupe de la race blanche s’avance vers des caractères qui lui sont spéciaux ; mais c’est toujours par une succession d’états transitoires qu’il arrive à une forme déterminée. Cette évolution, qu’on pourrait nommer l’embryogénie des races, entraîne à sa suite tous les faits de l’histoire des peuples. A mesure que les nations renouvellent leurs caractères physiques, elles renouvellent les bases de leur état social ; c’est dans le cours de ces progrès, et notamment dans la transition d’un âge à un autre, que se manifestent les grands évènemens qui changent la face politique des nations civilisées. Ce mouvement de formation ne s’arrête que quand la race a acquis tous ses élémens et s’est constituée sur le type qui lui est relatif. Il se fait alors une véritable station qui s’étend au physique et au moral des sociétés. Nous avons déjà retrouvé les traits de cette immobilité dans la population chinoise ou japonaise. M. Étienne Geoffroy-Saint-Hilaire, visitant la terre d’Égypte à la suite de nos armées, compara les habitans actuels de cette région à ceux qui dorment dans les hypogées : c’étaient les mêmes momies. Toute la différence qu’il put trouver entre elles, c’est que les unes étaient entourées de bandelettes, tandis que les autres étaient libres. Aucune des nations de l’Europe n’en est là, toutes s’avancent par un renouvellement continuel de formes, par une série de mutations, vers un état que nous ne connaissons pas encore.

Si maintenant nous comparons le mouvement de la race blanche à celui des autres races, nous découvrons qu’elle a effacé chez elle successivement les âges inférieurs qui composent d’une manière fixe l’état des civilisations orientales. Le degré d’avancement de ces dernières s’est répété chez nous l’un moment donné de notre histoire. Jetons un