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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/236

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mise en délibération du bill annuel qui donne à l’armée une existence légale. La chambre, s’étant ainsi emparée, autant qu’il dépendait d’elle, de tous les ressorts du gouvernement, procéda à des attaques plus directes. Sur la motion de lord Surrey, il fut décidé que la situation actuelle du pays exigeait un ministère investi de la confiance de la chambre et de la nation. Dundas, sans combattre directement cette motion agressive, avait proposé d’en modifier la rédaction en ce sens que le ministère eût dû réunir la confiance de la couronne, celle du parlement et celle du peuple. C’était faire ressortir très habilement ce qu’avait d’incomplet et d’illogique la proposition principale ; il était difficile de réfuter l’amendement, on se borna à le rejeter.

Lord Surrey fit encore déclarer, à une forte majorité, que le dernier changement de ministère était le résultat de l’influence exercée sur les délibérations du parlement au moyen de l’emploi inconstitutionnel du nom sacré du monarque, et que la nomination des nouveaux ministres avait eu lieu avec des circonstances extraordinaires peu faites pour leur concilier la confiance de la chambre. Le débat qui précéda ce dernier vote fut vif, amer, rempli de personnalités outrageantes. L’opposition coalisée fut dénoncée par les amis du ministère comme la confédération perverse de deux factions désespérées pour s’emparer du pouvoir, et on alla jusqu’à dire que Fox, en présentant son projet pour la réforme du gouvernement de l’Inde, avait tenté de se rendre plus puissant que le roi. Le langage des opposans ne fut ni moins exagéré, ni moins injurieux ; les ministres, à les entendre, n’étaient que le rebut, la lie des partis, des déserteurs enrôlés au service d’une influence secrète et inconstitutionnelle, pour fouler aux pieds les droits et la dignité de la chambre des communes en fondant un gouvernement d’intrigue et de favoritisme.

L’acharnement de la lutte, loin d’ébranler George III, l’attachait davantage au jeune ministre qui défendait si vigoureusement sa prérogative. Après la triste discussion dont nous venons de rapporter la substance, il écrivit à Pitt pour lui témoigner sa satisfaction et lui promettre la continuation de son appui, l’assurant que, dans le cas même où la coalition viendrait à l’emporter définitivement, il ne subirait pas son joug, que sa ligne de conduite était d’avance toute tracée, et que le courage nécessaire pour la suivre ne lui manquerait pas. Il voulait probablement parler encore d’une retraite en Hanovre.

L’opposition ayant enfin épuisé la série de ses résolutions hostiles, Pitt put soumettre à la chambre le plan qu’il avait annoncé pour l’administration des possessions de l’Inde. Il laissait cette administration,