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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/317

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de la garde municipale. Une multitude de recouvremens, variables et accidentels, comme les produits des amendes, les donations volontaires, la vente des vieux matériaux, la cession des terrains, l’intérêt des fonds placés momentanément au trésor, composent en total des sommes assez considérables. Si les propriétés monumentales de la ville de Paris avaient une valeur productive comparable à leur importance, la commune serait prodigieusement riche : il n’en est pas ainsi ; ses plus beaux édifices ne sont d’aucun revenu. Son patrimoine utile, réduit à quelques maisons et terrains susceptibles de location, à quelques constructions d’une utilité spéciale, comme les entrepôts qu’elle ouvre au commerce, reste inférieur à la fortune personnelle de plusieurs de ses habitans.

Nous avons dit que le budget moyen des recettes sous la restauration, avec un chiffre égal à celui de l’époque actuelle, était en réalité très inférieur. C’est qu’alors on portait à l’actif des sommes considérables, comme les emprunts extraordinaires, et les produits des jeux. Depuis 1832, la ville est assez riche pour se dispenser d’emprunter. Les jeux ont été supprimés en 1837. Est-ce un progrès ? est-ce une duperie ? La morale publique a-t-elle gagné en raison de l’énorme sacrifice fait en son nom ? Grande question, qu’il faudra reprendre bientôt si le démon du jeu, chassé des maisons publiques, est réhabilité par la mode et reçu dans les meilleurs salons. La ville de Paris a exploité les jeux, au moyen d’une ferme-régie, de 1819 à 1837 inclusivement. Pendant cette période de dix-neuf années, 137,313,403 francs sont entrés dans ses coffres : elle a cédé au trésor de l’état la part du lion, 104,500,000 francs ; son bénéfice, tous frais déduits, a été de plus de 1,500,000 francs par année. En analysant les clauses du bail, on découvre que la perte annuelle des joueurs excédait 10 millions : grace aux progrès de la population comme à ceux du luxe, cette perte doit dépasser 12 millions aujourd’hui. A qui revient cette somme dont l’état profitait ? Aux banques étrangères, aux tripots clandestins. Les millions enlevés au fisc ont constitué la liste civile des chevaliers d’industrie. Il fallait une sorte de courage pour jouer, quand le jeu était relégué, comme un vice honteux, dans les maisons suspectes : depuis qu’il est applaudi dans les salons, il faut du courage pour ne pas jouer. Il ne serait pas impossible que les excès du lansquenet fissent revenir nos législateurs sur leur douteuse réforme de 1837.

En résumé, après avoir décomposé le total des recettes et séparé les articles qui constituent des taxes plus ou moins déguisées, de ceux