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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/605

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au moins exagérées, et qu’en tout cas le véritable moyen de conjurer les dangers suscités par la malveillance serait de satisfaire aux griefs de l’opinion publique en lui accordant la liberté religieuse et la réforme parlementaire ; il dénonça comme plus dangereuses que les,clubs républicains les associations loyalistes où l’on prêchait le dogme de l’obéissance passive ; il se refusa à voir dans les actes de la France une cause suffisante de guerre, et avoua hardiment les vœux qu’il faisait pour qu’elle triomphât des despotes conjurés contre sa liberté. Pitt, qui, pourvu récemment de la sinécure de gardien des cinq ports, avait dû se présenter de nouveau devant ses commettans, n’était pas encore réélu. Il ne put donc répondre à Fox, mais ses collègues, et avec eux ses nouveaux alliés, Burke et Windham, eurent peu de peine à convaincre la chambre de la gravité des périls dont le chef de l’opposition ne voulait pas admettre l’existence. Lorsqu’on alla aux voix sur un amendement qu’il avait proposé au projet d’adresse, cet amendement ne réunit pas plus de 50 suffrages, dans une assemblée où siégeaient en ce moment 340 membres.

Fox, réduit désormais à cette faible phalange, dans laquelle figuraient, il est vrai, Grey, Sheridan, Erskine, Whitbread, ne perdait pas courage. Quelque certain qu’il fût d’avarice de voir rejeter toutes ses motions, il proposa de supplier le roi d’employer toutes les ressources de la négociation pour maintenir la paix avec la république française et d’envoyer un ambassadeur à Paris. Dans l’état des esprits, énoncer de telles idées, c’était provoquer les témoignages d’indignation de la majorité, qui ne furent pas épargnés à l’audacieux orateur. Pitt, qui, sur ces entrefaites, était rentré à la chambre des communes, s’empressa d’adhérer à tout ce que ses amis y avaient dit en son absence il ajouta pourtant que le gouvernement, résolu à faire vigoureusement la guerre, si elle devenait indispensable, n’omettrait rien, pour maintenir la paix, de ce qui était compatible avec la dignité de la couronne, la sûreté intérieure du pays et celle de l’Europe en général.

En France, le procès de Louis XVI était déjà commencé, et il n’était que trop facile d’en prévoir l’issue. Dans la chambre des communes Sheridan et Fox, dans celle des lords le marquis de Lansdowne, exprimèrent le venu que des démarches fussent faites auprès du gouvernement français pour essayer de détourner le glaive suspendu sur la tête de l’infortuné monarque. Fox parla en cette occasion un langage digne de sa générosité naturelle : il flétrit de sa véhémente éloquence l’illégalité, la barbarie de la procédure suivie devant la convention. Malheureusement il était évident que les démarches proposées, compromettantes pour le cabinet britannique, ne pourraient