Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 12.djvu/1076

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

grand intérêt de l’université, qu’il n’a entendu travailler qu’à accroître son autorité morale. Si des choix irréprochables et promptement décrétés permettaient, dans quelques jours, au nouveau conseil, d’entrer en exercice, tous les hommes de bonne foi suivraient avec impartialité cette grande expérience, dont la réussite peut, mieux que toutes les explications parlementaires, justifier et les intentions et la conduite de M. de Salvandy. M. le ministre de l’instruction publique est sincèrement dévoué, nous en sommes convaincus, à la cause de l’université. Il la sert avec activité, quelquefois avec pétulance, toujours avec le désir d’attacher son nom à de grandes mesures. Il est évident que le ministre qui, à quelques jours d’intervalle, a rendu les deux ordonnances sur les maîtres d’études et le conseil royal, a eu l’ambition de toucher en même temps à la base et au sommet de l’université, et clé régénérer à la fois les deux extrémités de ce grand corps. En donnant aux maîtres d’études les moyens d’agrandir leurs connaissances et leur carrière, en élevant leur condition morale et leur existence matérielle, M. de Salvandy a bien mérité de l’éducation. N’oublions pas non plus le courage avec lequel il propose aux chambres les dépenses qu’il estime nécessaires aux progrès de la science. Ces sentimens, ces qualités, peuvent expliquer ce que la gestion administrative de M. de Salvandy a, dans certaines circonstances, d’impétueux et d’imprévu.

La Belgique se montre assez peu soucieuse de nos griefs. Au moment même où il négocie chez nous le renouvellement de la convention de 1842, si gravement compromise par l’extension accordée aux vins et soieries d’Allemagne des faveurs précédemment stipulées dans cette convention au profit des vins et soieries de France, le gouvernement belge défend un projet de loi dont l’adoption aura pour résultat de transformer Anvers en port du Zollverein. Au terme de ce projet, Anvers, qui n’était depuis 1828 qu’un entrepôt de libre réexportation, deviendrait un entrepôt franc, où les marchandises étrangères destinées, soit au transit en Belgique, soit à la réexportation par mer, pourraient entrer, stationner, circuler, sans être soumises au déballage et à la vérification de détail. C’est là le but que poursuit depuis long-temps la diplomatie prussienne, et personne dans la chambre des représentans ne se l’est dissimulé. Les défenseurs du projet lui font même un mérite de ses tendances germaniques : l’exemption du déballage et de la vérification de détail appellera, disent-ils, dans le port d’Anvers tous les produits de l’Allemagne, qui, sans ces facilités, trouveraient profit à lui préférer les ports néerlandais. Très bien jusque-là. Nos voisins usent d’un droit incontestable, et ce n’est pas nous qui leur conseillerons l’isolement commercial. On peut seulement s’étonner de voir la Belgique afficher tant de condescendance pour le Zollverein, et tant de susceptibilité, de manque d’égards, de prétentions injustes vis-à-vis de nous. Le contraste qui ressort de la discussion actuelle est frappant. Outre les partisans avoués de la liberté commerciale, le projet a pour lui la plupart des prohibitionnistes de la chambre, ceux-là même qui