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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 12.djvu/141

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rationaliste, bien plus, un symbole sans croyances et qui serait repoussé à cause de sa sécheresse par la majorité des partis protestans. On n’a pas osé y prononcer le nom du Christ ! Czerski résista, mais vainement, et, jetant l’anathème aux impies, à des hommes qui cessaient d’être chrétiens, il retourna en Silésie ; Or, parmi les articles de ce contrat que les amis des lumières avaient fait triompher ; le plus important était celui-ci : que chaque commune élirait tous les ans son officiant, et que le prêtre ainsi désigné par le choix de la majorité pourrait se passer de l’ordination. C’était là une décision bien grave. Qu’on veuille se rappeler ce que nous avons indiqué tout à l’heure, l’union des catholiques dissidens avec les amis des lumières, par conséquent les questions politiques devenues peu à peu l’objet véritable des débats et substituées secrètement aux questions religieuses ; qu’on se rappelle aussi dans quel pays tout cela se passe, dans un pays où les actes qui constituent la famille, actes de naissance, actes de mariage, sont délivrés par l’autorité ecclésiastique ; maintenant, que cette église nouvelle soit reconnue avec les institutions démocratiques qu’elle s’est données, voilà le radicalisme absolu introduit par ruse au milieu de l’état !

Le gouvernement prussien ne pouvait rester plus long-temps dans cette quiétude parfaite où il se complaisait. Le réveil fut terrible, et, comme on avait poussé l’imprévoyance aussi loin que possible, on se prépara à être violent pour regagner le terrain perdu. C’était croire qu’on répare une faute par une faute plus sérieuse encore ; c’était s’engager dans une voie pleine de périls. On ne s’y engagea pas cependant aussi vite qu’on l’aurait désiré ; une objection très juste, très sensée et tout-à-fait inattendue ajourna la politique nouvelle que l’imagination pétulante du roi voulait substituer si brusquement à sa politique de la veille. C’est un détail curieux que je ne dois pas omettre. Le roi venait de porter au conseil l’affaire des catholiques allemands ; il demandait une décision immédiate ; il est bien entendu que les sectaires n’auraient pas été reconnus et qu’on les aurait chassés de la Prusse. Toutefois la question n’était pas si simple, et M Eichorn, ministre des cultes, en exposa franchement les difficultés. « Nous n’avons pas à statuer seulement, disait-il, sur une secte, sur une église particulière ; il y a en Prusse plus d’une église non reconnue ; ce qui sera décidé pour l’une sera décidé pour l’autre ; l’attention de tous les esprits est tournée vers ces matières, et, à moins de nous couvrir de ridicule, nous ne pouvons agir là et reculer ici. Nous n’avons qu’une seule décision à prendre, et cette décision devra être appliquée à toutes les sectes