Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 12.djvu/435

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tous deux fonctionnaires publics, que sir Robert Peel se vit contraint de les abandonner. En somme, le parlement, dans cette seule session, vota 4,250 kilomètres de chemins de fer dont la construction, d’après les devis, doit coûter près d’un milliard ; encore beaucoup de projets furent-ils rejetés ou ajournés à la prochaine session comme n’étant pas suffisamment préparés. Il n’est pas étonnant que les hommes sensés conçoivent quelques inquiétudes, et se demandent si la fortune de l’Angleterre, toute bien assise qu’elle est, pourra soutenir un tel poids.

Cette année comme les années précédentes, la ligue contre les lois des céréales fit sa démonstration habituelle et voulut compter ses voix. En 1844, M. Villiers ait réuni, en faveur de la liberté commerciale 124 voix contre 328 ; en 1845, le même M. Villiers obtint 122 vois contre 254, c’est-à-dire un chiffre relativement un peu plus fort. Quelques jours auparavant, M. Hutt, dans la même pensée, avait proposé d’accorder au blé de l’Australasie le même privilège qu’au blé du Canada, et M. Ward de soumettre à une enquête les charges particulières qui pèsent sur la terre et les privilèges dont elle jouit ; mais la motion de M. Hutt avait été rejetée par 147 voix contre 93, et celle de M. Ward par 182 voix contre 109. Enfin, vers les derniers jours de la session, lord John Russell, au nom de l’opposition, crut devoir lire une grande motion sur l’état du pays, et proposa à la chambre une série de résolutions qui n’embrassaient rien moins que la liberté du commerce, les loi sur les céréales, la colonisation, l’éducation publique, et plusieurs autres questions également importantes. C’était singulièrement élargir le cercle du débat et le rendre, par son étendue même, insignifiant et vague ; aussi la chambre, malgré l’autorité de lord John Russell, n’y prêta-t-elle qu’une médiocre attention. D’une part, lord Howick et lord John Russell firent de l’état matériel et moral du pays un tableau triste et décourageant ; de l’autre, sir James Graham et sir Robert, Peel prétendirent que ce tableau n’était pas exact, et nièrent la détresse des classes pauvres. Puis vint, au nom du parti agricole, M. Tyrrel, qui se plaignit vivement de sir Robert Peel, et, au nom du parti radical, M. Sharman-Crawford, qui aux neuf résolutions de lord John Russell en joignit une dixième concernant le suffrage universel. Tout cela dit, l’amendement Crawford réunit 33 voix contre 253, la motion Russell 104 voix contre 182, et le rideau tomba sur cette discussion sans but, sans unité, sans intérêt, sur cette froide et vaine comédie parlementaire que tout le monde jugea peu digne le son auteur.

La fin de la session fut un peu ranimée par trois ou quatre questions