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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 12.djvu/461

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whigs[1]. Lord Palmerston, ministre des affaires étrangères, est donc pour beaucoup de whigs comme pour la plupart des radicaux un véritable épouvantail. C’est à lui de voir si, par un vain entêtement, il lui convient de nuire éternellement à la cause libérale, à ses amis, à lui-même. C’est à lui de voir s’il n’est pas temps d’abandonner la thèse impossible qu’il soutient, et de ne plus mériter que M. Hume et M. Roebuck le comparent à « une allumette chimique.. » En attendant, je le répète, trop querelleur pour qu’on ose s’associer à lui, trop considérable dans son parti pour qu’on puisse le congédier honnêtement et sûrement, lord Palmerston fait les affaires de lord Aberdeen, et affermit le pouvoir aux mains de sir Robert Peel. Du côté des ultra-tories, aucune chance de faire triompher leurs idées, et par conséquent toutes les raisons possibles de se rapprocher du cabinet actuel ; du côté des whigs, peu d’espoir de trouver un terrain favorable et de faire converger vers un but commun les forces dispersées de l’opposition ; beaucoup de difficultés en outre pour former, même en se renfermant dans un cercle étroit, une administration bien vue du pays et de l’opinion libérale : tel est à mon sens, l’état actuel des partis parlementaires. J’ajoute que l’attitude d’OConnell et sa résolution de ne plus accéder à aucun compromis est pour les whigs, en supposant qu’il y tînt, un nouvel embarras, et un obstacle peut-être insurmontable. De tout cela je conclus que, selon toute apparence, à moins d’évènemens imprévus, sir Robert Peel, en 1846, sera encore premier ministre. Il est pourtant une chance en faveur de

  1. Ces pages étaient écrites quand la mort héroïque de quatre cents Français en Algérie est venue provoquer, en Angleterre, l’explosion d’une joie sauvage. À cette triste manifestation, aucun parti, malheureusement, n’est resté tout-à-fait étranger. Cependant il est juste de reconnaître que le langage du Morning Chronicle, organe des whigs, et du Sun, organe des radicaux modérés, a été comparativement convenable. Les journaux tories au contraire, le Times, le Herald, le Post, et le journal des méthodistes wesléiens, le Globe, ont dépassé toute mesure. Quoi qu’il en soit, il y a dans un tel fait une réponse terrible, accablante, ceux qui, dans le bon accueil fait l’an dernier au roi des Français, prétendaient voir la preuve d’une réconciliation sincère entre les deux pays. Que ce fait ne nous rende pas injustes envers l’Angleterre mais qu’il nous rende justes envers nous-mêmes, et qu’il nous éclaire sur le véritable état les choses. En 1840, il s’est trouvé à Paris des écrivains, des députés, les ministres, pour soutenir, avec lord Palmerston, que l’Angleterre avait raison contre la France, et qu’elle avait atteint, si ce n’est dépassé, la dernière limite des concessions. Depuis 1840, il se trouve des ministres, des écrivains, des députés, pour répéter que, si de bons rapports ne se rétablissent pas entre les deux peuples, il faut s’en prendre au langage violent et haineux de l’opposition française. Qu’en disent-ils maintenant ? La leçon est-elle suffisante, ou bien sera-t-elle, comme tant d’autres, oubliée au bout d’un mois ou deux ?