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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 12.djvu/474

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LA MARQUISE

De mieux en mieux. Quel ton tragique ! Moi, je vous ai défendu de m’aimer ?

LE COMTE

Certainement, de vous en parler, du moins.

LA MARQUISE

Eh bien ! je vous le permets ; voyons votre éloquence.

LE COMTE

Si vous le disiez sérieusement…

LA MARQUISE

Que vous importe ? pourvu que je le dise.

LE COMTE

C’est que, tout en riant, il pourrait bien y avoir quelqu’un ici qui courût des risques.

LA MARQUISE

Oh ! oh ! de grands périls ? monsieur.

LE COMTE

Peut-être, madame ; mais, par malheur, le danger ne serait que pour moi.

LA MARQUISE

Quand on a peur, on ne fait pas le brave. Eh bien ! voyons. Vous ne dites rien ? Vous me menacez, je m’expose, et vous ne bougez. pas ? Je m’attendais à vous voir au moins vous précipiter à mes pieds comme Rodrigue ou M. Camus lui-même. Il y serait déjà, à votre place.

LE COMTE

Cela vous divertit donc beaucoup de vous moquer du pauvre monde ?

LA MARQUISE

Et vous, cela vous surprend donc bien, de ce qu’on ose vous braver en face ?

LE COMTE

Prenez garde ; si vous êtes brave, j’ai été hussard, moi, madame, je suis bien aise de vous le dire, et il n’y a pas encore si long-temps.

LA MARQUISE

Vraiment ! Eh bien ! à la bonne heure une déclaration de hussard, cela doit être curieux ; je n’ai jamais vu cela de ma vie. Voulez-vous que j’appelle ma femme de chambre ? Je suppose qu’elle saura vous répondre. Vous me donnerez une représentation. (On entend la sonette.)