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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 13.djvu/209

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que de choses dévotement élégantes furent dites à ce sujet, et reconstituer avec leur secours le sombre esprit de la société anglaise avant 1645.

Les Écossais, qui ont chassé Marie Stuart la catholique, donnent l’impulsion de la révolte ; par eux, les prophéties bibliques se réalisent ; les tentes d’Israël se déploient, on sort de Kedar et de Meshec. Démocratie, fanatisme, haine nationale, se combinent dans la redoutable année, à laquelle Charles Ier oppose inutilement ses courtisans fatigués et ses évêques mécontens. Elle avait pour officiers ceux même de Gustave-Adolphe, les vieux athlètes du Nord protestant. On se demande pourquoi aucun historien anglais n’a vu cette marche ascendante et belliqueuse du Nord, qui se venge de Rome, détruit les pompes du culte, déchire les élégances d’un art qui ne lui appartient pas, rappelle la simplicité et la nudité de l’Évangile primitif, et anéantit la hiérarchie papale. Ce mouvement va chercher au fond de la ville endormie de Saint-Yves et dans sa petite maison d’Ely l’arrière-neveu du persécuteur Thomas Cromwell, Olivier Cromwell.

Bientôt le roi se trouva sans argent, et, forcé d’en demander aux communes, il ouvrit une nouvelle session, à laquelle Cromwell assista. Les Écossais avançaient toujours ; il y avait dans le peuple une fureur croissante contre les ornemens de la messe et les « surplis de la Toussaint ; » les soldats du roi partageaient cette fureur démocratique. Passaient-ils devant la maison d’un puritain, trois hourrahs la saluaient ; reconnaissait-on celle d’un de ces damnés qui portaient, chose effroyable, « quatre surplis à la Toussaint, » les soldats entraient chez lui et jetaient ses meubles par la fenêtre. Cependant l’armée écossaise chantant des psaumes, chaque homme portant un petit havresac plein de farine, avec uniforme gris de lin et bonnet bleu, ne jurant jamais, régulière comme il convient aux enfans du Seigneur, passait la Tweed, conduite par David Lesley, le petit vieillard tortu. Charles, abandonné de la masse de ses sujets, mai servi par ses chevaliers, ne parvint pas à déloger du Northumberland et du comté de Durham ces Écossais puritains, pleins d’une tendresse fraternelle, « doux comme des agneaux, terribles comme des lions, » et qui s’y maintinrent une année entière, appelant aux armes leurs bons frères d’Angleterre contre le trône et les évêques, contre Rome et les surplis. Ces appels ne restaient point sans effet : on regardait les Écossais comme les sauveurs et gardes avancées du protestantisme. Lorsqu’il fallut encore, faute d’argent, réunir en 167P0 les communes, où